Comment j’ai arrêté de manger par automatisme

Tous les soirs, je prends le train dans le même wagon. Tous les soirs, cet homme est là. Attentif, souriant, la soixantaine marquée, le grignotage compulsif. 16h47, il déchire le paquet. Barbecue, sel de mer, vinaigrées. Le goût des chips change, mais le bruit reste le même, caractéristique. En trois ans, je ne l’ai jamais vu rater un seul rendez-vous. 

Je n’avais jamais réalisé que le grignotage était aussi répandu avant d’arrêter moi-même. De l’adjointe, croisée dans l’ascenseur, qui avoue à sa collègue faire chaque jour à 16h30 une pause « bonbons ». Au boss de je ne sais quelle entreprise, dévorant une barre tendre sur les coups de dix heures. En passant par ce coursier, que je vois souvent, la main serrée sur sa beigne du Tim’s.

Je sais bien moi, qu’ils ont de bonnes raisons. « On dirait que j’en ai besoin, pour mon énergie », confiait l’adjointe. « Ça prend bien ça, pour affronter le froid », ne peut s’empêcher de me glisser le coursier. Le chef d’entreprise, lui, ne s’épanche guère, mais le sac de sport qu’il balance en silence au bout de son poing justifie les moyens. 

Je ne sais pas durant combien d’années j’ai fait ça, grignoter. Avec les années, les collations étaient plus santé, et surtout elles étaient toujours faites maison. Mais remettre en cause le principe même de la collation, et puis du goûter, ça m’a pris de longues années pour le faire. Depuis quelques mois, j’avais même pris l’habitude de sauter le petit déjeuner pour justifier mon envie de manger une fois arrivée au bureau. Le petit gâteau que je prenais toujours avec mon premier café était un incontournable.

Moi aussi je disais toujours « j’en ai besoin », et puis « je ne sais pas faire autrement ». Et j’avais faim, tellement faim. De la vraie faim ? Pas si sûr! Mais la faim de l’habitude, ça, certainement.

Je savais, quand même, que ça faisait trop. J’avais commencé à faire ce que je m’étais toujours refusé : compter les calories. Pas à chaque jour, pas obsessionnellement. Mais suffisamment de fois pour constater que c’était trop, tout ça. Que le muffin de dix heures, même si j’en connaissais chaque ingrédient pour l’avoir intégré moi-même, même si c’était du bio, du bon, et du fait maison, n’en restait pas moins « de trop ». 

Alors ça m’est venu comme ça, la nouvelle année sûrement. J’ai arrêté de me chercher des excuses. J’ai profité de la coupure occasionnée par les deux semaines de congé pour changer mes habitudes. Au retour, j’avais beaucoup de travail et moins de temps. Alors la faim de l’habitude s’en est allée, tranquillement. Un jour il a été midi, et je n’avais rien vu passer. J’ai dévoré mon lunch. J’avais faim, pour de vrai, de cette faim qui vous fait dévorer un plat à belles dents, et avec appétit.

Et puis un changement en entraînant un autre, j’ai délaissé les desserts. Moi qui me targuais de ne pouvoir finir que « sur une petite note sucrée », j’ai fait fi de plus de trente années de yaourts et compotes, de gâteaux et de chocolat. De ces morceaux sucrés que l’on croque sans vraiment les vouloir, parfois encore un peu écœuré de tout le repas juste avalé.

J’ai décidé de prendre le plat, et puis juste un fruit. Pas de goûter prévu, alors j’ai mangé le plat, et attendu pour le fruit. Je l’ai laissé juste là, près de mon clavier. A 15h, je l’ai savouré. Ce n’était pas un dessert, ce n’était pas une collation obligée, c’était juste un plaisir fruité.

J’en suis encore surprise. Moi qui ai la volonté d’un poulpe en fin de vie. Je n’ai jamais été intéressée par les régimes, je me méfie des recettes miracles, et le poids que je fais m’indiffère la plupart du temps. Mais mon énergie, ça non. 

J’avais besoin de poursuivre ma route vers cette recherche de bonne santé, de mieux traiter son corps. Je lui devais bien ça, après toutes ces années. 

Prochain objectif, je le mets au sport!

Et vous? Un changement avec cette nouvelle année ?

-Lexie Swing-