Une main toute entière {Immigration}

Dans quelques jours, j’entrerai dans la cour des grands. Je serai un 5 ans et +, comme dirait ma fille. J’aurai, à mon actif, 5 ans d’immigration. 5 ans, une main toute entière. À mon échelle, c’est une poignée d’années. À celle de mon aînée, une existence entière.

Nous avons basculé, inexorablement, vers l’inertie du quotidien, l’habitude. Je ne questionne plus – pour autant que je l’ai jamais fait – je parcours, je vis, j’oscille dans cette continuité apaisée. Nous y avons nos repères, géographiques et sentimentaux. Nous avons vécu des premières fois, des deuxièmes, des dizaines et centaines. Nous avons déménagé à l’intérieur de ce même pays, de cette même province. Nous sommes passés de la ville à la banlieue, de un à deux enfants, d’un appartement à une maison avec jardin, d’un job à l’autre.

Et c’est peut-être ça qui marque un changement. Grandir à l’intérieur de son immigration, s’y installer, y faire son nid. Accepter une nouvelle réalité, et la transformer à son image. La faire sienne.

Nous aurions, probablement, fait tout cela. Nous aurions eu deux enfants, nous aurions acheté une maison, nous aurions évolué professionnellement, nous serions partis en vacances. Mais nous l’avons fait dans une autre dimension et à un autre niveau. Au sein de traditions et de paysages différents.

Nous avons construit le nid et sommes partis à l’aventure. Nous sommes désormais sereins. Les aventures elles-mêmes ont pris une autre mesure et s’inscrivent dans des frontières géographiques dont nous n’osions pas rêver. Nous planifions des voyages en Gaspésie, aux Iles-de-la-Madeleine, en Nouvelle-Écosse, en Colombie-Britannique… Nous revenons du Nouveau-Brunswick et avons passé plus d’une fois la frontière avec les États-Unis. Nous avons été à de nombreuses reprises vers l’Ouest, visitant l’Ontario. Et nos souhaits nous amènent à Hawaï (qui se prononce Hawaiii), à Seattle ou San Francisco, en Amérique Latine. Sur ce même continent.

La vie est-elle si différente ici ? Non. Les pas que l’on fait sont les mêmes, seul le chemin est différent. Ici, il est sec en été, lumineux et enneigé en hiver. Il est ruisselant au printemps et se couvre de feuilles écarlates l’automne venu.

L’important, finalement, est d’y être bien. Que l’horizon soit lumineux et la route pas trop sinueuse. Depuis 5 ans, et pour longtemps, je suis ici, et j’y suis bien.

-Lexie Swing-

Cet immigrant que je ne saurais voir

Pour défendre une certaine notion de patrie, certains, s’érigeant en pourfendeurs de l’immigration, sont portés à croire que la citoyenneté devrait reposer sur des origines, une couleur de peau, la sonorité d’un nom. Ainsi, en France, on a tendance à estimer, par défaut, que le jeune Nicolas est plus français que son ami Chen. Je ne dis pas ces noms au hasard.

Nicolas est certes d’origine française mais il ne connaît rien à la France. Son père était perpétuellement muté dans un nouveau pays, il a notamment passé 12 ans en Afrique et il est né au Kenya.

Chen est né dans un bled à côté de Strasbourg, de parents chinois immigrés en France une dizaine d’années avant sa naissance. Il a été à l’école à Strasbourg, et il a été à Lyon à l’Université. Un jour, un ami commun lui a demandé comment c’était « là d’où il venait » et il a décrit un village de carte postale où les gens parlaient un français mâtiné d’allemand. Je ne sais pas s’il a fait exprès de parler de son village alsacien mais la vérité, et je l’ai su plus tard, c’est que Chen n’était jamais allé en Chine. Il s’y est rendu plus tard, seul et en backpack, pour découvrir un pays qui était celui de ses origines certes, mais qui lui était inconnu.

J’ai toujours eu plus de points communs avec Chen qu’avec Nicolas. C’était fascinant d’entendre Nicolas raconter ses premiers pas dans la brousse (sérieusement, c’est plus fancy que les trottoirs de Paris ou d’Alger pour apprendre à marcher non ??) mais on n’avait pas la même culture. Il ne connaissait pas les Minikeums, il restait de marbre devant les répliques cultes de la Cité de la peur ou du Père Noël est une ordure, il n’avait jamais lu Astrapi. Chen, si.

C’est cependant en arrivant au Québec que j’ai pris la mesure de la citoyenneté que je portais, et de l’étrangère que j’étais. Même si j’assimile parfaitement l’accent, et que je finis par connaître Montréal comme ma poche; même si je participe à élire le prochain gouvernement et qu’on me délivre un passeport en règle, je ne deviendrais réellement québécoise que le jour où j’en assimilerais la culture. Lorsque le nom des politiques et l’humour des comédiens trouveront écho dans mon esprit et que je pourrais fredonner une toune connue.

Et il y aura d’ailleurs ceci de différent entre mes filles et leurs cousins, qui les rendront définitivement plus proches de leurs amis d’école – quelles que soient leurs origines – qu’elles auront les mêmes souvenirs musicaux, littéraires et bien sûr télévisuels. Parce que la langue elle-même est différente et que rien – à commencer par les films – ne porte le même nom des deux bords de l’Atlantique.

Et c’est bien la preuve, s’il en faut, qu’on ne voit jamais plus loin que le bout de notre nez. Que parce que nos voisins ont les yeux allongés, le teint olive et l’accent marqué, on s’imagine qu’on sait tout : comment ils vivent, pour quel Dieu ils prient et à quoi ils aspirent. On prétend surtout savoir qu’ils ne sont pas d’ici, sans jamais se demander ce que c’est, être d’ici. Est-ce que c’est d’avoir le teint pâle et le ton affecté? Ou bien est-ce d’aimer une terre si fort qu’on a été prêt à traverser le monde pour la rejoindre? Est-ce que c’est respecter des traditions, en les faisant siennes ? Adopter des coutumes, des habitudes et tout un peuple ? Choisir un pays pour y travailler, pour y élever ses enfants et pour s’y endormir chaque soir, en s’y sentant en sécurité et à la bonne place ?

Je me souviens d’une fille, interviewée lors de ma première année au Québec, qui me disait être victime de ce que j’appellerais un double délit : nom et faciès. Elle avait un nom vietnamien, elle avait le type asiatique, et avait été estampillée « français balbutiant » par tout employeur qui croisait son CV, réduisant à néant ses possibilités d’être embauchée dans ce petit coin du Québec où elle vivait. Je lui ai parlé au téléphone. Je ne lui ai parlé qu’au téléphone même. Et pour moi elle n’est restée qu’une voix. Un accent québécois marqué. Des expressions typiques. Rien ne trahissait ses origines. Mais ses parents lui avaient légué ce qu’il y a de plus lourd à porter aujourd’hui pour un enfant d’immigrés : un nom à consonance étrangère et des traits d’ailleurs.

Notre connaissance des autres est construite sur des présupposés. Une femme au foyer est forcément inéduquée, des piercings nombreux sont l’apanage de la marginalité, l’enfant qui court au restaurant est victime d’une éducation laxiste, quand celui qui dort avec ses parents est un enfant-roi.

Notre vision est faite de cases étriquées dans lesquelles nous tentons de faire rentrer le monde qui nous entoure. Nous faisons fi de ceux qui font le grand écart, des funambules, suspendus entre deux réalités, de ceux qui résistent et de ceux dont l’esprit est trop large pour rentrer dans la case assignée.

Nous imaginons notre monde comme l’un de ces immeubles à clapiers, comme ils en poussent par dizaines dans les banlieues françaises. Ces champignons qui empoisonnent la société. Ces cages à poules minuscules qui dégueulent d’immigrants.

Ça ne rentre pas. Quand est-ce que les arriérés de ce monde se rendront compte que ça ne rentre pas? Que la vie n’est pas un putain de sudoku avec un chiffre par case. Que la palette ne suffit plus à créer tous ces métissages. Qu’il va falloir changer de plan. Cesser la linéarité. Accepter les nuances, les contours flous, la cacophonie des accents chantants.

L’aquarelle n’est pas terminée et la réalité n’est pas immuable. Essorez les pinceaux, il est temps de changer le décor.

-Lexie Swing-

Photo : Slava Bowman

Enfants : 3 activités en intérieur sur la Rive-Sud

Il faisait -10 degrés, c’était presque comme un mois d’août : on se promenait, à peine vêtus, sillonnant dans la blancheur de l’hiver, ahanant sous le poids des luges chargées de marmots. Et puis soudain, black-out, -20 degrés, ressentis -1000. On a testé quelques descentes dans l’allée du garage, après une oreille et deux orteils de perdus, il a fallu se rendre à l’évidence et les armes avec : il nous fallait des activités en intérieur.

Nous avons donc établi un programme serré pour permettre à notre petit cheval fou de se dépenser. L’occasion pour nous de découvrir de nouveaux endroits sur la Rive-Sud. Pas convaincus? Suivez la guide (moi)!

Machin Chouette, à Saint-Jean-sur-Richelieu

Saint-Jean est ma nouvelle place-I-must-visit. Elle a tapé dans mon top 3 après un tour rapide dans le vieux Saint-Jean (je cherchais le magasin pour enfants Le Petit Cocon, j’ai pu admirer ses murs de briques depuis l’extérieur mais malheureusement, considérant l’heure tardive, les portes étaient déjà fermées). Mais Saint-Jean est aussi la ville où se trouve Machin Chouette, une salle de jeu pour enfants qui tranche franchement avec les gros complexes où l’on se rend d’ordinaire. Un gros module multi-âges avec différents passages, trois glissades moyennes et une grande glissade tube; un espace 0-3 ans avec petite piscine à boules, glissade, jeux accrochés au mur, gros dada…, un(e) trampoline, et un mur d’escalade (payant). Un deuxième espace est dévolu à la pratique du hockey en salle (ç’a-tu un nom?). Un troisième est estampillé “jeux calmes”, avec dinette, cuisine, jeux de concentration, magasin… Clairement pas la tasse de thé de Tempête, qui a filé à l’anglaise rejoindre le GROS module, la GRANDE glissade, les GRANDS enfants (c’est incroyable la vitesse à laquelle court cette petite). Au milieu, plusieurs grandes tables et un espace restauration avec de vraies choses appétissantes (et du pop-corn pour Miss Swing qui considère que c’est la meilleure chose au monde) (avec les pâtes au saumon).

Pour quel tarif? 6,95 dollars de 1 à 3 ans, 11,95 dollars pour les plus de 3 ans. Les parents paient 4,95 dollars, les grands-parents ne paient pas (les veinards). On a trouvé l’espace restauration bon marché, payant moins de dix dollars pour plus de choses que notre cabaret (plateau) pouvait en contenir.

Plus d’infos? Sur le site internet de Machin Chouette


Corporation aquatique maskoutaine, à St-Hyacinthe

Oui oui vous avez bien lu, on va à la PISCINE. Range-moi ce petit air dubitatif, je sais qu’il fait -20 degrés mais l’eau, elle, est à 31 degrés! C’est Hawaï à St-Hyacinthe, avec les petits jets d’eau qui éclaboussent ton poupon rieur.

A St-Hyacinthe, il y a un grand bassin découpé en une pataugeoire pourvue de mutliples jeux (avec une progression “niveau pour bébés”, “niveau pour toddlers”) et deux glissades (le parent qui se pelait sur le bord parce que sa deux ans avait décidé que c’était tellement chouette la glissade, c’était moi) (ok, c’était Mr Swing, mais c’est parce que je suis frileuse et que j’ai dit “c’est toi qui y va” la première). Un couloir d’eau mène à une partie plus profonde et à des lignes de nage. De l’autre côté de la piscine, il y a un bassin avec des lignes de nage plus longues et des plongeoirs. Comme il y faisait 5 degrés de moins, je l’ai admiré de loin. Pour les plus grands, ou les petits pas peureux, il y a une grande glissade chronométrée avec record à battre. Pour les “sans-enfants”, il y a un aussi un bain à remous et un sauna. C’est the-place-to-be pour fatiguer ses enfants en une heure de temps. Et tes oreilles avec. Ne me remercie pas.

Pour quel tarif? L’accès sans carte Loisirs revient à 5 dollars pour les enfants de plus de 3 ans et à 7 dollars pour les adultes. Les plus de 60 ans ne paient pas, je vais finir par croire qu’on cherche à les privilégier!

Plus d’infos? Sur le site internet de la Corporation aquatique maskoutaine


iSaute, à Brossard

Je n’ai pas testé iSaute, je préfère vous l’annoncer tout de go. Cependant je sais de source sûre que c’est un chouette lieu pour les enfants qui ont besoin de se dépenser.

Il s’agit d’un grand entrepôt avec 20 000 pieds carrés de trampolines. Il y a majoritairement des trampolines classiques mais aussi un espace de basket-ball trampoline et un autre de ballon-chasseur trampoline.

Nous prévoyons y aller prochainement à un moment réservé aux tout-petits. Pour un tarif avantageux, l’espace est ainsi réservé aux 6 ans et moins les vendredis, samedis et dimanches de 9h à 10h.

Pour quel tarif? Pour la tranche horaire réservé aux 6 ans et moins, le prix est de 10 dollars pour un enfant + un adulte. Le tarif régulier est sinon de 16 dollars la première heure.

Plus d’infos? Sur le site internet de iSaute

-Lexie Swing-

Crédit photos : Lexie Swing + iSaute

Ton petit hiver au Canada

Aux futurs immigrants, on annonce sans détours «tu verras, le Canada, c’est six mois d’hiver». Et si ce n’est pas tout à fait vrai, ce n’est pas complètement faux non plus. Mais alors que j’attaque mon cinquième hiver sous ces cieux, je me rends compte que c’est moins la longueur de l’hiver que les paysages qui me dépaysent.

Il y a quelques soirs de ça, un samedi je crois, nous avons pris la voiture en direction de la piste de luges, aménagée au cœur d’un parc proche. C’est courant par chez nous, des pistes de luges aménagées, même si cela ne signifie en rien que le vin chaud t’attend à l’arrivée.

Nous étions donc au sommet, à contempler la pente et les alentours, perchés alors entre deux écoles. La francophone de Montarville, et l’anglophone de Mount Bruno. Je regardais la cour de la première, recouverte de son épais manteau blanc. Leur petite école sous la neige. J’ai dit ça à voix haute parce que je pensais que ça ferait un bon titre. Bien sûr, comme j’ai dit ça sans préambule, mon amoureux m’a regardé bizarrement. Mais pas trop quand même puisqu’en dix ans il a largement pris la température de mon étrangeté. Il a donc dit «quoi?», et j’ai répondu que nos filles grandiraient dans ce pays-là, où l’on va à l’école par moins 15 degrés et où les cours sont recouvertes de neige. Nous ne côtoyons pas encore ces écoles-là, mais la cour de notre garderie est bien remplie elle aussi de cette neige impeccable. Et c’est un bonheur de les voir grimper à la file en haut de la petite butte, pour glisser chacun leur tour dans leur petit traîneau de plastique. C’est toute une enfance, une certaine enfance en tout cas.

Certains grandiront les pieds dans le sable et les yeux dans l’eau, pour ne plagier personne, d’autres feront leurs premiers pas sur les trottoirs de Manille, de Paris ou d’Alger, et ne me remerciez pas pour l’air qui vous trotte désormais dans la tête. Mais mes filles grandiront les pieds dans la neige, marcheront d’un équilibre précaire sur les trottoirs verglacés et feront de la luge six mois par année.

Et c’est vrai que j’aime tellement ça la neige. La première, la dixième aussi. La banlieue nous convie volontiers dans sa blancheur immaculée. Comme à Montréal les routes se salissent, les voitures garrochant de la slush boueuse le long des trottoirs. Mais nos rues transversales, nos cours arrières, nos stationnements, nos parcs de jeux, conservent leur manteau d’hiver. Et c’est un peu des vacances que l’on transporte chaque jour au fond de nos poches, un peu de Noël, un peu de ces jours lents, de ces histoires au coin de feu, de ces pistes dévalées, de ces raclettes avalées.

Saint-Bruno, ma ville chérie, n’est pas en reste dans cette féérie. Ainsi vêtue, elle s’illumine encore un peu plus, devenant durant quelques mois la représentation québécoise des stations de ski de mes jeunes souvenirs. On souffle alors dans l’air froid, les joues rougies, les mains blanches. On presse le pas vers Caffellini, vers le Markina, vers la Tasse Verte ou même en direction de la nouvelle boulangerie du Pain dans les Voiles. On jette les mitaines sur la table avant d’agripper le café chaud, le chocolat bouillant et ses petits chamallows flottants, le thé aux effluves de cannelle. On prend le temps de s’arrêter, puisque la neige impose cette lenteur. On reprendra la course plus tard…

De très belles Fêtes à vous tous, soyez heureux!

-Lexie Swing-

Noël : s’inventer des traditions

Cette année, c’est à cinq que nous passerons les fêtes. A quatre humains et un poilu, nous réveillonnerons, souperons, déjeunerons et ouvrirons des cadeaux arrivés par la poste depuis le Vieux Continent.

C’est la première année, de toutes les années passées, que nous le faisons seuls, tous les cinq, tous les deux.

Dans ma famille, Noël n’a jamais eu l’effervescence des grandes tablées familiales. Il y en a eu, certainement, puis le départ de certains, à commencer par les aïeuls, a comme dispersé les traditionnelles retrouvailles. Les habituels grands écarts géographiques familiaux nous ont conduit à fêter Noël parfois bien avant l’heure, quand ce n’était pas quelques jours après. Enfant, j’ai même été à DisneyLand, pour les fêtes de Noël, remplaçant les réunions familiales par une autre féerie.

Lorsque nous sommes devenus un couple, Mr Swing et moi avons commencé à nous diviser nous mêmes entre les familles. Tantôt dans la même ville, le hasard voulant que nos familles soient originaires toutes deux de la Loire. Et parfois entre le Sud-Ouest et l’Auvergne. Nous avons alors quelquefois fait étape devant une minuscule église, sur le bord de la départementale, pour nous échanger nos cadeaux. Juste les nôtres, loin du flou et du folie qui règne d’ordinaire au moment de l’ouverture familiale des cadeaux. Un moment suspendu. Notre propre début de tradition.

Cette année, seuls pour la première fois, nous en inventons des nouvelles. Comme le sapin que nous sommes allés chercher à pied, pour notre troisième hiver. Ou le calendrier de l’avent que je pensais ouvrir le matin, comme on faisait chez moi, et que l’on découvre finalement le soir, comme cela se faisait chez mon amoureux, parce que le temps du matin file si vite que l’on ne le saisit jamais.

Nous en imaginons d’autres, magasinant notre table de Noël et notre guirlande extérieure. Créant nos photophores. Décidant que le Père Noël ne se nourrira pas seulement de biscuits, mais de pop-corn. Inventant la règle du « chacun s’habille comme il préfère le jour de Noël, moi en pyjama et toi maman dans ta robe de soirée ». Choisissant des pâtes au saumon, « parce que c’est mon plat préféré de toute la vie ». Votant pour un brunch de Noël, le 25 décembre. Sachant déjà, puisque c’est une tradition chez nous de longue date, que Diana Krall chantera en fond sonore, le soir du réveillon.

Il y a des choses qui restent encore à inventer: ferons-nous de la luge le jour de Noël ? Le Père Noël acceptera-t-il autre chose que des clémentines ? Fera-t-on des jeux ? Et surtout, quel dessert cuisinerai-je?

Quels souvenirs aussi, garderont-elles de ces jours heureux ? Le rire de leur père ? Le goût du saumon? Les poils du chien pris dans le scotch des paquets cadeaux ? Les jeux, le repas, la musique ?

Autour de moi, chacun aura sa propre façon de vivre Noël. En famille, entre amis souvent aussi, spécialité des expats et immigrants, en couple, seul, au travail, avec son association bénévole, avec sa troupe … Il y aura les Noels prévus. Et les impromptus. Les retards d’avion, la tempête tardive, la grippe malvenue.

Surtout, ne vous mettez pas la pression. Que vous soyez hôte ou visiteur, seul, entre amis ou entre collègues, prenez le temps d’apprécier l’instant. Asseyez-vous par terre dans les poils du chien, ou d’une fesse sur le bras du canapé. Laissez-vous porter par le moment, ne jouez pas de rôle imposé par des années de pratique en réunions familiales. Riez avec les enfants et commencez par la bûche si le cœur vous en dit. Ce soir la tradition c’est vous qui l’inventerez.

-Lexie Swing- (fête bientôt Noël)

Crédit photo : Denise Johnson

Immigration : obtenir un médecin de famille (encore)

DocteurIl est difficile de trouver, et d’obtenir, un médecin de famille au Canada. Tout le monde vous le dira. Et les immigrants ne sont pas seuls dans cette galère : en 2015, 420 000 Québécois étaient inscrits sur les listes d’attente du Guichet pour la clientèle orpheline (GACO), un chiffre qui avait déjà quadruplé par rapport à 2013.

Obtenir un médecin est comme trouver le Graal. Au point que, lorsqu’une clinique m’a appelée un jour au bureau en cherchant une ancienne collègue, qui avait visiblement donné le numéro de poste de la ligne qui était désormais la mienne, je me suis dépêchée de la prévenir par LinkedIn qu’un médecin de famille lui avait été attribuée et qu’on cherchait à la joindre. Car le message laissé par la clinique était pressant : elle devait rappeler sans délai sous peine de voir son attribution lui passer sous le nez…

De notre côté, nous avions été chanceux. Sitôt arrivés au Québec, nous avions pris rendez-vous dans une clinique privée pour enfants où, moyennant le paiement d’un abonnement, un médecin nous a été attribué. Cette jeune médecin ayant encore de la place et recevant aussi les adultes dans une autre clinique de Montréal, elle nous a proposé de nous prendre sous son aile… Nous avions un médecin!

Cependant voilà, les années ont passé et nous avons déménagé loin, bien loin de la clinique où se passaient les rendez-vous semi annuels des filles. Une journée de congé était nécessaire pour nous permettre d’y assister. Et même si nous avions créé une routine amusante, dinant toujours au même restaurant et profitant de l’occasion pour arpenter notre ancien quartier, nous avons commencé à songer à trouver un nouveau médecin.

Pas facile, pensez-vous… (avec raison).

Cependant, l’idée n’est pas venue seule. Si nous nous rendions de moins en moins aux rendez-vous de suivi (deux sur quatre seulement pour Tempête), nous avions littéralement pris une carte de fidélité à la toute nouvelle clinique de notre ville pour les otites à répétition de notre toute-petite. Alors que je déplorais la distance qui nous séparait de notre médecin de famille, la secrétaire m’a souligné, en passant, que tous les gens inscrits sur les listes de la clinique avaient été contactés, et qu’il était possible de s’inscrire et d’espérer avoir une place dans l’année.

Aussitôt dit, aussitôt fait. J’avais deux possibilités : nous désinscrire des listes de notre premier médecin et me réinscrire sur celles de notre secteur médical. Ou réussir à nous inscrire sur la liste du Guichet de la clientèle orpheline en conservant notre médecin jusqu’à obtenir une nouvelle attribution. Et la deuxième solution a été validée par ledit guichet!

L’inscription fut faite en septembre, et en novembre nous recevions le précieux appel : celui qui vous informe que vous avez obtenu un médecin. Cela ne représente pas pour nous la joie que cela doit procurer chez ceux qui attendent depuis longtemps, mais tentons d’imaginer quand même le bonheur de cet appel : vous avez enfin quelqu’un vers qui vous tourner lorsque vous êtes malade, quelqu’un qui connait votre dossier et peut faire des suivis, une clinique médicale à laquelle vous référer. Ce n’est plus l’angoisse de devoir faire des vérifications, ou des prises de sang. Mieux : dans notre clinique, et sûrement dans plusieurs cliniques, une fois que vous êtes inscrit auprès d’un médecin de cette clinique, vous pouvez appeler le matin même et espérer obtenir un rendez-vous dans les 24 à 48h.

On ne se rend pas compte de ce que représente le fait d’avoir un médecin de famille, ou un médecin traitant, avant de ne plus en avoir. Si vous venez d’arriver au Québec, ne tardez pas et inscrivez-vous sur la liste du Guichet de votre région. N’hésitez pas, également, à poser la question. Peut-être que, comme nous, le médecin de votre enfant travaille aussi comme médecin de famille pour adultes. Parfois, il suffit juste de tomber au bon moment, sur la bonne personne.

Et de votre côté, avez-vous trouvé un médecin?

-Lexie Swing-

Crédit photo : Hush Nadoo

Réflexions post-Halloween

Pour la toute première fois, mes filles et moi sommes allées récolter des bonbons. Elles en avaient déjà eu à la garderie, j’aurais pu sans problème «oublier» encore une fois cette année et dire que j’y penserai l’année prochaine, mais mon amie D. a ri quand j’ai commencé à suggérer que j’allais repousser. Parce que j’avais déjà fait de même l’an dernier, bien sûr… Alors j’ai interrogé l’une de mes collègues, pour connaître les hot-spots de ma ville (clairement pas ma rue, toute désignée pour être un quartier fantôme tant les gens se terraient hier soir pour ne surtout pas avoir à donner des bonbons, nous y compris!).
À la sortie de la garderie, avec l’esprit tranquillisé par l’idée que mon souper était déjà prêt (team «je prépare tous mes repas la fin de semaine»), j’ai chargé mes enfants dans la voiture et j’ai roulé jusqu’au quartier pressenti. La rue dans laquelle je me suis engagée était bien décorée, à la dixième maison invitante je me suis donc garée. J’ai vidé les sacs de bonbons déjà bourrés par la garderie sur le plancher de l’auto et j’ai embarqué mon petit monde dans sa première tournée des maisons (qui a dit «des bars»?). Je m’étais renseignée avant sur ce qu’il fallait dire, ça parait évident comme ça mais je ne voulais pas passer pour la fille qui ne connaît l’Halloween qu’à travers les séries américaines. Exit Trick or Treat, nous avons clamé «Joyeux Halloween» dès que la porte s’est ouverte. Enfin moi surtout parce que ma grande avait déjà la main dans la poche à bonbons et ma petite tentait de repousser les jambes de la dame pour entrer chez elle. J’ai des enfants bien élevés. Après une petite remise en ordre, et aux ordres («on n’entre pas chez les gens», «on dit vous et pas tu», «on ne se sert pas, on attend qu’on vous donne», «on ne réclame pas des bonbons supplémentaires») on a pu continuer notre chemin, sous le regard admiratif de mes filles qui n’en revenaient pas qu’il suffise de taper à une porte pour obtenir des bonbons.

Hansel et Gretel ont donc couru en tous sens dans la rue animée, poussant chaque fois plus loin leur exploration, agrémentée de «oh regarde une autre maison avec une citrouille là-bas» à chaque fois que je sous-entendais vouloir rejoindre la voiture. Dix fourberies du genre plus tard, j’ai finalement obtenu gain de cause. Les sacs ne fermaient plus et mes poches étaient pleines. Ma grande fille a quand même suggéré de vider une nouvelle fois les sacs dans la voiture et j’ai décidé d’ignorer cette tentative sournoise de continuer la soirée (mais de qui tient-elle ces idées?!).

C’était un joli moment, je ne peux qu’en convenir. J’ai aimé les rues animées, les décorations soignées et la gentillesse des hôtes. Les familles entières et les groupes d’amis hilares. Les portes qui s’ouvraient sur de jeunes parents et de tout petits bébés adorablement déguisés. J’ai aimé notre butin, la répartition, la possibilité de dire «ok tu as le droit de manger une sucette avant le souper», parce que c’était une journée si spéciale.

J’ai été surprise par ailleurs de constater que tant d’amis en France avaient eu l’occasion de parcourir eux aussi les rues avec leurs enfants et que l’Halloween était également fêté dans certaines écoles, dans les garderies ou dans les centres aérés. Je pense que j’avais une quinzaine d’années lorsque les premières festivités en la matière sont arrivées en France, mais j’ai souvenir également qu’elles sont vite tombées à l’eau, taxées d’américanisme. On ne voyait pas vraiment l’intérêt de cette fête dont on ne comprenait pas l’origine, la culture et la tradition. Quand je suis partie en 2013, je n’ai pas plus le souvenir de quelque chose d’aussi tangible que ce que j’ai pu voir dans certaines photos. Une chose m’a marquée par contre (et réciproquement si j’en crois certains commentaires de mes amis) : nos déguisements de l’Halloween sont bien plus gentillets que ceux de la France. Ici, dans la rue, j’ai croisé des sorcières oui, mais aussi et surtout des pompiers, des chiens de la Pat’Patrouille, des docteurs, des policiers, des super-héros, des hot-dogs, des animaux en masse, des dinosaures et beaucoup de licornes. Sur les photos de la famille et des amis en France : des masques terrifiants, des maquillages superbes mais épeurants, des sorcières et sorciers, des fantômes, des vampires… Notre Halloween est en fait votre Carnaval, les bonbons en plus et les crêpes en moins.

Sur une autre note, j’ai aimé aussi cette photo que j’ai partagée hier de la famille du Premier Ministre. Justin Trudeau y est déguisé en Clark Kent/Superman, mais ce sont ses deux plus jeunes enfants qui ont attiré mon regard : sa fille, arborant la tenue de Wonder Woman. Son plus jeune fils, déguisé en Skye, la chienne Skye, celle-là même qui est tout de rose vêtue dans Pat’ Patrouille. Car on pourra avoir tous les messages positifs du monde sur la discrimination par le genre et l’importance de respecter les enfants quels que soient leurs choix et leurs envies, il n’y a que les actes qui peuvent donner du poids aux mots. Que l’on aime ou pas ce premier ministre là, cette famille-là, n’enlève ni n’ajoute au fait qu’ils sont des personnes publiques, qui ont envoyé hier un message fort aux enfants de demain, et aux parents qui les accompagnent.

 -Lexie Swing-

Crédit photos : Lexie Swing

L’Indien n’est pas un costume d’Halloween

Lorsque j’étais petite fille, l’Halloween n’était pas encore très courant en France. Lorsque nous nous déguisions, c’était pour Mardi Gras, une fête catholique située juste avant le Carême. Un défilé avait lieu, on mangeait des choses grasses comme des bugnes (ça n’a pas la même forme que des beignes mais c’est gras pareil) ou plus sucrées comme des crêpes, on allait à la vogue et on était heureux.
J’avais les cheveux longs, j’avais le visage fin, je portais bien les nattes, j’étais faite pour être déguisée comme les Indiennes des contes. On m’affublait d’un ruban et de plumes, et d’une robe à franges en suédine. Je me plaisais dans le miroir, c’était un joli déguisement.

On en trouve encore, des déguisements comme ça, dans les rayons des boutiques françaises. Ils sont toujours aussi mignons, mais même si je magasine volontiers dans ces boutiques-là pour l’Halloween, le costume d’Indienne n’est plus sur ma liste. La vision de l’Indienne telle qu’elle est perçue en France n’a rien à voir avec la façon dont est perçue la culture autochtone. Car la femme autochtone n’est pas un personnage. Ce n’est pas le Rocky de Paw Patrol, ce n’est pas le Mario de Mario Kart. Ce n’est pas une pompière, ce n’est pas un M&M’s. Ce n’est ni une job, ni un objet, ni un personnage de dessin animé, ni même un personnage célèbre. C’est une culture et une communauté plurielles. Ce sont des coutumes. Ce sont des langues. Ce sont des personnes auxquelles il serait doux de s’identifier si leur culture n’avait pas été tant (re)niée dans l’Histoire et à l’époque actuelle.

Aussi, et ce n’est pas moi mais une étudiante de Winnipeg qui le disait l’an dernier, ces costumes – car oui il s’en vend aussi au Canada – donnent une image non seulement fausse, mais également très figée de la culture autochtone, une image très datée en réalité. Un professeur du Manitoba, interrogé dans le même article, déplorait même que les Autochtones soient perçus, à travers ces déguisements, comme des « sauvages exotiques ».

Tous, cependant, ne sont pas d’accord avec cette vision des choses. Dans un second article daté également de l’an dernier et paru dans La Presse, on aborde la notion de tabou et d’hypersensibilité, on y insère les mots censure et liberté d’expression, déplorant qu’au nom du politiquement correct, on ne puisse plus se déguiser en Indienne, ou en Geisha, en Chinoise, en Mexicain portant cigare et sombrero ou même en Noir.

Pourtant, cela va – et c’est seulement mon opinion – au delà de la liberté d’expression, c’est prioritaire sur la notion de droit ou de censure, c’est une question de respect. Et c’est la raison pour laquelle ce n’est pas un problème d’être déguisée en Petite Indienne en France, et que ça l’est au Québec. Le poids de l’Histoire, la place d’une communauté dans une société, devrait primer sur le droit de porter n’importe quel déguisement à l’Halloween. La Petite Indienne en France est un personnage de livre, une héroïne de dessin animé. La communauté à laquelle un tel déguisement ferait référence ici au Québec se doit d’avoir le respect de son peuple, les Canadiens. Tout comme n’importe quelle communauté, a fortiori si elle est ou a été discriminée.

Et non, contrairement au parallèle émis dans l’article mentionné ci-dessus, je ne pense pas que cela puisse être mis sur le même plan qu’un déguisement de Flamenco ou de French Cancan. Ni même de Geisha. Et celui qui crie au loup revient à dire que les Françaises dansent toutes le French Cancan, et que les Espagnoles maîtrisent toutes le Flamenco. Pour avoir du sang des deux peuples, je vous confirme que l’on peut être aussi peu douée dans l’un ET dans l’autre.

Alors exit le déguisement de Petite Indienne, nous avons misé sur du solide, du doux, du pelucheux cette année. En bons végés, amis des bêtes, nous avons voté pour la ménagerie. Cette année nous avons donc l’ex chat, devenu souris (une reconversion) et le petit cheval déguisé en chat (des oreilles qui trainaient par là).

Et vous, quels déguisements avez-vous ressorti des placards? Et pensez-vous que l’on devrait pouvoir tout porter?

-Lexie Swing-

Connaissez-vous la région de Charlevoix?

Entre Charlevoix et nous, c’est une histoire d’amour. On a longtemps cru que c’était le nom d’une ville, on voulait « aller à Charlevoix », mais nous avons dû nous rendre à l’évidence : Charlevoix, c’est plus que ça. C’est une région, un ensemble. Des parcs naturels avec des vues à couper le souffle, le Saint-Laurent, les jolies villes qui bordent le chemin, le petit train qui remonte le long du fleuve, entre Québec et la Malbaie. C’est le terroir, la tradition, les élevages d’animaux (même de lamas!), les fromageries…

Nous revenons de Charlevoix. Mon chum a encore dressé des plans, arpenté des terrains et visionné des maisons, j’ai encore retenu mon souffle face au mouvement de l’eau tantôt apaisée, tantôt agitée. Il a fait 25 degrés et de la pluie battante dans la même journée. Et puis orage, le soir venu…

Allez faire un tour, à Charlevoix… Pour deux jours, pour une étape, pour une semaine. Donnez-vous cette chance, c’est une région magnifique.

-Lexie Swing-

Crédit photos : Lexie Swing

 

Quand l’anglais bloque…

Au Québec, à Montréal du moins, tout le monde parle peu ou prou anglais. Au moins un peu. Contrairement à la France, il est rare de commencer une phrase par «Hey, can I ask you…» et de se retrouver face à une personne montrant une incompréhension totale. Suivant le niveau de la conversation, il est possible que l’on vous réponde en français, mais la compréhension orale est bonne. Le quotidien, les publicités, la radio, la télévision et le reste ont largement contribué à cet état de fait.

Alors quand on arrive au Québec, on réalise vite qu’il va falloir maîtriser aussi l’anglais, au moins un petit peu. Lorsque l’on travaille dans les services, ou en contact avec la clientèle, il est (selon moi) indispensable d’être capable d’interagir dans les deux langues, dans le cadre d’une conversation basique au moins. Et surtout, surtout, d’être capable de comprendre son interlocuteur.

Travaillant pour un média francophone, j’ai passé les trois premières années dans un confortable déni de mon piètre niveau. Je m’y suis trouvée confrontée, à de rares moments, lors d’entrevues avec des anglophones, mais la honte du moment était vite oubliée.

Peu à peu, parce que l’on reprenait et synthétisait des articles de médias anglophones, ma compréhension s’est améliorée. Reste que je me retrouvais incapable d’aligner deux mots.

J’ai pourtant passé quelques mois en Irlande, mois dont je suis revenue avec un anglais courant, à défaut d’être fluent. Mais face à la concurrence environnante, et cette aisance à changer de langue au fil d’une même conversation, ma capacité à m’exprimer en anglais s’est comme atrophiée. Je me suis mise à bafouiller, à dire des do quand il fallait dire does, et des is quand j’aurais dû dire was. Mon accent, qui de façon surprenante était relativement correct pour une Française; mon accent est devenu indéchiffrable, incompréhensible. Un yaourt semblait habiter ma bouche. Une patate brûlante.

J’ai changé de travail et j’ai commencé à devoir échanger avec des Anglophones. À l’écrit, à l’oral. Au fil des réunions, ma compréhension devenait quasiment parfaite. Mais lorsqu’il s’agissait de s’exprimer, m’agrippant au principe de la province francophone, je me rabattais sur le français. Toujours. Si je devais écrire un courriel en anglais, je vérifiais la moitié des mots sur Linguee et ne mettait personne en CC.

Et puis un beau jour on m’a proposé des cours d’anglais. Pas parce que mon niveau était atroce mais parce que cela se faisait, dans mon entreprise. Je me suis donc retrouvée face à elle, ma prof. Une Anglophone de Montréal au rire sans fin et au verbe pointu. Une fille passionnante, avec qui j’ai commencé à échanger sur toutes sortes de sujets, faisant fi de cette langue que je ne maîtrisais plus.

Quand elle m’a demandé «Que souhaites-tu retirer de ce cours, pour quelle raison es-tu là?», j’ai mentionné mon envie de dépasser mes peurs. Peu importait que je fasse des fautes, je voulais être capable de parler, juste ça, parler.

Trois heures par semaine ont eu raison de mes appréhensions. Tout à coup le barrage a lâché. Tout à coup ma parole s’est libérée. J’ai cessé de tout regarder sur Linguee. Je me suis fait confiance, puisqu’elle semblait me comprendre.

Trois semaines après mes débuts, mon accent était revenu, normal, habituel. Pas parfait mais compréhensible. Et pour la première fois, cette semaine, j’ai mis une collègue en CC. Sans relire dix fois. Juste comme ça. Parce que maintenant je sais, je suis capable, et demain sûrement je saurais encore mieux.

Ce que je fais pour améliorer mon anglais au quotidien:

  • Je lis de la chick-lit. Je sens que là je vous fais rêver… Je suis incapable de lire Bridget Jones et autres comédies romantiques du genre, sauf en anglais! En anglais je n’ai pas conscience du style, ni de l’incohérence de l’histoire. Les histoires sont gentillettes. Parfaites pour lire sans se prendre la tête en butant sur les mots. S’il y en a un que je ne saisis pas, ce n’est pas grave, ça ne devrait pas me faire perdre le fil de l’histoire… Dans le même genre, une amie m’a confiée avoir lu Fifty Shades of Grey dans la langue de Shakespeare. Et puis c’est facile, martinet se dit martinet, en anglais.
  • Je parcours des articles. Je lis Courrier International depuis des années… La distance fait que, désormais, je le lis en priorité sur Internet. Alors quand la version originale est anglophone, je n’hésite plus, je me plonge dans l’article en VO. Et si à la fin j’ai un doute de compréhension, je peux toujours relire la traduction de Courrier International, histoire de…
  • Netfliiiix. A notre arrivée au Canada, nous avons dédaigné la télévision pour investir dans ce qui n’existait alors pas en France : Netflix. Si j’imagine que dans l’Hexagone les films et séries proposés sont traduits en français, il n’en est pas de même ici. Certains sous-titres sont parfois disponibles, mais pas partout, et pas tout le temps. Et puis on s’habitue vite à la vraie voix de Chandler ou de Monica (vous vous rappelez lorsque le doublage changeait soudainement au milieu d’une saison? Affreux!). Désormais, on ne cherche plus. On écoute les films en anglais, sous-titrés en anglais au besoin. Et on imaginerait plus les regarder autrement!
  • J’écoute des podcasts! C’est assez récent, ça a commencé lorsque J. a abordé le sujet de ses podcasts préférés sur son blogue. J’ai notamment commencé à écouter « Terrible, thanks for asking« . Nira McInerny a une histoire difficile mais une voix incroyable. J’adore l’entendre. Plus récemment, je me suis lancée dans « Stuff Mum Never Told You« , un podcast animé par deux Américaines et qui traite de sujets sur les femmes / le féminisme. Je les écoute pendant ma pause lunch au boulot ou dans le train. Je sais que J. écoute plutôt lorsqu’elle marche dans la rue. Chacun ses habitudes, l’important est d’habituer son oreille et d’entrainer sa compréhension orale!

Et vous, parlez-vous bien anglais? Au boulot? Dans la vie de tous les jours? Comment faites-vous pour vous entraîner?

-Lexie Swing-