Les aléas de l’habillage d’hiver

Quand E. voyage incognito./ Photo DR Lexie Swing

Quand E. voyage incognito./ Photo DR Lexie Swing

C’est beau l’hiver. C’est même féérique. Si vous étiez avec moi ce matin, à déguster un café en grains pas très bon parce que j’ai la flemme de courir à Montréal en racheter, nous nous installerions devant la fenêtre tels deux petits vieux pour regarder la neige tomber. Elle est lourde, épaisse, immaculée, et scintillante dans le jour déjà levé. J’adore la neige. Ça fait couic couic sous les pieds quand on marche, et dans ma petite ville de la rive-sud recouverte de son manteau blanc, j’ai l’impression perpétuelle d’être en vacances aux sports d’hiver, comme on disait avant. Mon âme d’enfant embrasse pleinement toute cette neige. Mon âme de mère, en revanche…

Au Québec, les températures avoisinent volontiers les -15 – 20 l’hiver. Parfois beaucoup moins bien sûr – les fameux pics à -40, et parfois plus. Après tout, le 24 décembre, il faisait 14 degrés. Mais disons que -15, c’est une température avec laquelle nous avons l’habitude de composer. Les habits sont faits en fonction, particulièrement les habits d’enfants, qui ont le chic pour tomber tous les trois mètres (enfin pas tous les enfants, mais la mienne oui) et faire l’ange au milieu du jardin. Les habits sont chauds. Les habits sont étanches. Les habits sont une horreur à mettre. Une crise de nerfs matinale. A vous faire regretter l’été et ses robes-sandales. Jugez plutôt du déroulé :

  • Il est 8h20. Vous devez être à la garderie à 8h30. Vous avez sept minutes de marche. Donc trois pour vous préparer. Vous êtes en retard avant même d’avoir commencé.
  • Vous posez le bébé dans son transat.
  • Vous enfilez son manteau au toddler. Puis ses mitaines (ses gants). Puis sa tuque (son bonnet).
  • Il enlève ses gants au motif qu’ils n’étaient « pas bien mis ».
  • Vous remettez les mitaines.
  • Vous vous rendez compte que vous n’avez pas mis le pantalon de neige. Celui avec les bretelles qui passent sur les épaules.
  • Vous enlevez le manteau du toddler. Il jette ses mitaines par terre. Et sa tuque, parce que « je veux pas de la tuque sans le manteau, c’est moche ».
  • Le bébé pleurniche. Vous lui remettez sa sucette.
  • Vous mettez une jambe dans le pantalon. L’autre. Vous remontez le tout. Le toddler crie parce que le chandail est remonté à mi-dos. Vous poussez avec les doigts pour faire glisser le chandail. Vous malmenez un peu les bras pour les faire passer dans les bretelles. Vous accrochez le tout. Vous voulez mettre le manteau. Mais le toddler veut d’abord mettre les bottes parce que le pantalon sans les bottes, « ça va pas ».
  • Vous mettez les bottes (et rattrapez l’enfant avant qu’il tombe à la renverse). Vous mettez le manteau. Vous mettez la tuque et les mitaines.
  • Vous enfilez votre manteau et votre tuque. Vous attachez le porte bébé.
  • Le bébé crache la suce sur le plancher, directement dans la neige souillée qu’il y avait sous les bottes.
  • Vous partez nettoyer la sucette sous l’eau (et bénissez les anciens proprios d’avoir fait construire une sdb au sous-sol).
  • Quand vous revenez, le toddler a jeté ses mitaines par terre une nouvelle fois. Vous vous acharnez à les lui remettre. Le pouce ne rentre pas. Puis il crie « par dessous par dessous », parce qu’il ne veut pas que les mitaines recouvrent son manteau. Vous les mettez dessous. Il ne veut pas « dessous comme ça », il veut « dessous avec l’élastique noir par dessus ». Vous allez chercher ledit élastique noir dans la manche (la protection pour la neige), vous le mettez par-dessus le gant, puis passez le reste de la manche sur le tout. Vous serrez l’attache au poignet. C’est trop serré. L’enfant veut le faire lui-même. Mais il a des moufles et il n’y arrive pas. Il essaye d’enlever ses moufles. Vous menacez. Il boude et se jette à plat ventre par terre.
  • Vous attrapez le poupon, le glissez dans sa combinaison. Il fait 40 degrés dans votre manteau. Le bébé ne coopère pas d’un poil et tient ses bras serrés sur sa poitrine. Vous arrachez un bras pour le glisser dans la manche. Il hurle comme un petit cochon. Vous enfilez la cagoule. Arnachez le bébé. Suez pour attacher le porte bébé entre les omoplates.
  • Vous ramassez l’enfant. Le bébé hurle de se retrouver la tête en bas. Vous parvenez à enfiler vos bottes sans défaire les lacets. Vous vous rendez compte que vous n’avez pas mis de moufles au bébé sous sa combinaison. Renoncez à l’idée de le défaire et partez à la garderie les coudes serrés le long du corps, pour garder au chaud les mains du bébé glissées dessous (il y a a combinaison par dessus quand meme hein, mais par -20 une paire de moufles supplémentaire n’est pas superflue).

Ouf. Je suis épuisée rien que de l’écrire. Bien sûr il y a des jours où Miss Swing est à la fois autonome et coopérative. Elle enfile ses affaires seule, aide à attacher le porte-bébé, me rappelle que j’ai oublié de mettre les moufles, etc. Il y a des matins, beaucoup d’ailleurs, où la petite mandarine rigole tout le long, en jouant avec sa sucette. Et puis il y a aussi d’autres jours, où il faut remettre les moufles dix fois, où les nez n’arrêtent pas de couler, où je me souviens que j’ai laissé le chèque pour la garderie dans la cuisine à l’étage alors que j’ai déjà mes bottes. Il y a l’arrivée à la garderie aussi, toujours périlleuse. Il faut aider Miss Swing à se déshabiller sans trop balloter sa soeur dans le porte-bébé, puis enlever ses propres bottes souillées pour se rendre au local des 3 ans.

J’aime la neige. J’adore même. Mais j’avoue, je gagne chaque jour en admiration pour ces éducatrices qui doivent chaque jour habiller des dizaines d’enfants. Patiemment. En sachant que pour 30 minutes de préparation, ils passeront à peine 15 minutes dehors.

« Oui mais avec Miss Swing c’est facile, elle fait tout toute seule, elle est parfaitement autonome », nous a dit récemment l’éducatrice. Ah…

-Lexie Swing-

4 réflexions sur “Les aléas de l’habillage d’hiver

  1. J’ai bien rigolé en lisant ton article… et tu me fais rêver avec toute cette neige et ce froid! Ici en région parisienne c’est le printemps avant l’heure… ça me change des hivers froids et enneigés de ma Suisse natale! A part ça bon courage pour les prochains matins… je compatis! ;)

  2. on imagine parfaitement la scène….et je te tire mon chapeau lol
    ça me rappelle la fois où j’ai pris l’avion sans mari avec les deux enfants et où il fallait passer la sécurité, on enlève le manteau, les chaussures, le bébé du porte bébé, les trucs qui font sonner le portique…..et puis on peut pas remettre le porte bébé toute seule alors on galère, on demande à un agent de sécurité de tenir le bébé deux minutes (et là le bébé vomit un peu sur l’agent oups)… j’ai dit plus jamais ça! alors le faire tous les jours mon dieu lol

    bisous

  3. Je travaillais en garderie comme éducatrice, j’ai eu un peu tous les groupes d’âge et je me suis dit que non, je n’aurais JAMAIS un bébé au Québec à cause de ces séances d’habillage ( du vrai travail à la chaîne on se retrouve en nage à la fin de l’habillage de tous,les enfants)
    Ne jamais dire jamais :-p

  4. Oh le couic couic quand tu foules la neige………. ça me manque j’avoue, mais pas tant que ça quand je pense que hier j’ai réveillé Michoco à 8h22 pour un départ à 8h25 de la maison !!! Bon hiver…

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