« Une vie n’y suffirait pas », ai-je lâché, rendue lyrique par l’épuisement. 13 heures, c’est le temps qu’il nous a fallu pour venir à bout de notre déménagement.
Pourtant, nous étions roués à l’exercice. Quatre déménagements à notre actif, une centaine de cartons faits, refaits et défaits, des bibelots empaquetés dans du papier journal, des verres protégés un à un à l’aide de papier bulle, des vêtements pliés dans des valises, des bouquins soigneusement rangés par format, le petit livre de recettes pour tenir le coin, les beaux livres empilés ensemble et les romans de poche dans un carton de couches Huggies avec les encoches sur les côtés qui font poignées.
On pensait maîtriser le concept, on s’est retrouvé englouti sous la réalité. Un départ pour une autre vie de l’autre côté de l’Atlantique, ce n’est pas un déménagement anodin. C’est un nouveau tome. Et pour bien partir, il fallait finir d’écrire le volume précédent. Ce qui signifie des tas de papiers à trier, des tas de babioles à jeter, des tas de vêtements à donner.
On a quadrillé la pièce, fait des piles de cartons et de meubles « pour Maman », « pour D&V », pour l’Auvergne, pour Midi-Pyrénées, pour le Canada, pour les copains, et pour la déchetterie aussi. On a réparti, on a monté dans le camion, on a ressorti du camion quand un meuble du Tarn-et-Garonne s’est retrouvé coincé entre deux cartons clermontois. On a lâché prise, on a tapé du pied, on s’est assis désespéré sur nos cantines d’affaires « vitales » qui prendront l’avion cargo dans quelques semaines, on s’est lancé des citations débiles du genre « Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait » pour se donner du courage, on a fait cuire des hot-dogs dans notre vieux micro-ondes avant de l’emballer. A 3h du matin, Mister Swing a poussé le ficus dans le dernier micro-coin du camion tandis que j’aplatissais les branches pour que « la tête passe ». Et puis on a claqué les portes.
C’est terminé. C’était impossible et pourtant on l’a fait. En 13 heures. A deux. Avec ce vague sentiment d’être sorti victorieux du deuxième de nos douze travaux herculéens.
Après ça, on a repeint la maison.
-Lexie Swing-