Vie(rtuelle)

J’ai un groupe de copines, vous l’ai-je déjà dit? Ce sont des mamans, comme moi, des mères de bébés de 13 mois, comme moi. C’est un peu ce qui nous a réunies, en fait. Par quel heureux hasard? Par un forum. Sur internet, il n’y a pas de coïncidences, rien que du bon référencement.

On se connait depuis 21 mois environ: 13 mois + 8 de grossesse (moins un mois le temps de se trouver). On a une relation bizarre, intime et lointaine, tout à la fois. Une relation virtuelle. On connaît la date de nos règles respectives mais pas nos noms de famille. On se raconte par le menu nos repas du jour mais on ne connaît nos salons que sur des photos. On se soutient les jours de pluie, à toute heure et surtout la nuit, pendant les insomnies; mais aucune de nous ne sera là aux mariages des autres.

Pourquoi en parler tout à coup? Parce qu’il y a quelques semaines encore, nous étions 12. Et que désormais, nous ne sommes que 11. L’une de nous a fait sécession, en silence. Dans la vie virtuelle, nul besoin de claquer la porte, un désabonnement suffit. Je l’aimais beaucoup, et si elle passe par là, je voudrais lui dire encore que je regrette son départ. Elle dit qu’elle ne se reconnaissait plus dans les conversations, qu’elle ne se sentait pas intégrée.

Cinq amies./ Pub Diet Coke

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Et là, ça m’a sauté aux yeux: était-ce vraiment si important, tout ça? Assez pour qu’elle prenne la peine de quitter notre groupe, quand elle aurait pu se contenter d’y naviguer en sous-marin, picorant dans les conversations et affichant quelques photos de son joli dernier-né? La vie virtuelle est-elle devenue la vie réelle? Et si demain je dois appeler mes 15 meilleures copines, seront-elles seulement mes bonnes amies de l’école, du lycée et de quelques boulots, ou compterais-je dans mes rangs ces mamans, forumeuses ou blogueuses, qui font mon quotidien à coup de notifications?

J’ai passé ces dernières années à dire des phrases qui commençaient par « oui mais dans la vraie vie… » Mais c’est la vraie vie, la vie physique et la vie virtuelle sont aujourd’hui solidement imbriquées. Et certains ont beau se dissimuler derrière des pseudonymes et de l’anonymat pour abuser des commentaires insultants et du cyber-harcèlement, tous nos actes virtuels ont un impact, exactement comme nos actes physiques. Si demain je traite de salope ma voisine dans la rue, elle sera blessée. Si je le fais sur son profil Facebook, elle le sera également, et peut-être même plus. Car d’une rue peu passante et d’une insulte lâchée dans le vent, on sera passé à un site monté comme Big Browser sur lequel mon insulte serait affichée au su et vu de tout le monde et livrée à la vindicte populaire.

Les amitiés virtuelles ne sont pas moins réelles. Mais tant que l’on n’en maîtrisera pas mieux les codes, ces amitiés-là resteront plus difficiles à gérer. A nous d’apprendre à communiquer, à nous de nous demander « Vais-je vexer quelqu’un? », à nous, surtout, de ne pas oublier qu’il existe aussi une autre vie, physique, faite de contacts, de mélodies et de sourires. Une vie où l’on peut moins tricher, une vie où l’anonymat n’a pas droit de cité. Une vie où la vie(rtuelle) a une vraie place, mais pas TOUTE la place.

-Lexie Swing-

4 réflexions sur “Vie(rtuelle)

  1. Merci pour ce billet, c’est exactement comme ca que je vis aussi le « virtuel ». Ça ont peut être aussi de l’expatriation. Il y a longtemps que les contacts avec les copines restées en France passent par internet, par le virtuel même si on départ on s’est rencontré dans la vraie vie.

  2. Pour moi la frontière réel, virtuel, est plus que mince. Je fais parti, tout comme toi d’ailleurs (bah ué jsuis pas beaucoup plus vieux) de cette génération qui a découvert internet à l’adolescence, et j’y ai passé beaucoup de temps depuis mes 15ans… du coup je me suis fait un certains nombre d’amis virtuels, certains sont devenus des amis du réel, d’autres ont été des rencontres a un instant T pour un week end, une soirée. Aujourd`hui le fait que je sois totalement instable sur mon lieux d’habitation fait que 100% de mes amis je ne les ai plus que dans la vie virtuelle 95% du temps, et au final ça ne change pas tant de chose que ça, je trouve même que ça peut rapprocher parfois, car la disponibilitée est souvent accrue (plus facile de tchater avec un pote a 1h du mat que de lui dire « tu viens on va boire un verre? »). Mais avec le temps j’ai des amis partout dans le monde, aux USA, en Australie, en Nouvelle Caledonie, en Angola, au 4 coins de la France, etc…. et je trouve ça génial :)
    Bref, une sceance de tchat ou de skype ne remplacera jamais une biere à la terrasse d,un bistrot,mais ça y contribue :)

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