
Dublin./ Photo Giuseppe Milo
J’allais écrire « huit ans déjà », mais ce défilé du temps me surprend à chaque nouveau rappel du passé, quelle qu’en soit l’origine. Des amis italiens, rencontrés à Dublin, se sont retrouvés pour le mariage de l’une d’eux, ce week-end, à Rome. Sur Facebook, les photos de leurs retrouvailles, et cette mention « huit ans déjà ».
Huit ans que nous nous sommes rencontrés, puis que nous avons quitté Dublin. E. était une jeune fille à peine majeure, délurée, mais pleine de projets, I. et A. se tournaient autour, avec la ferveur de ceux qui savent qu’ils ne se reverront peut-être jamais, Ele était déjà une fille calme, souriante et solide comme un roc, quand C. hésitait entre ses études de commerce et sa vocation d’acteur. Et puis Chia aimait déjà la musique…
Huit ans déjà. E. est désormais responsable du secteur Asie pour un producteur de vins espagnols… et quadrilingue. I. et A. se sont mariés, et Ele a du user de toute sa force intérieure pour accompagner sa première petite fille, née trop tôt. C. est finalement devenu un businessman accompli, mais à voir ses pitreries, je n’ai pas de doute sur le fait que ses qualités d’acteur le taraudent encore. Quant à Chia, elle s’est accrochée, pour devenir chanteuse professionnelle.
Je ne leur parle pas, ou peu. Je voyage avec leurs photos d’Asie, m’émeut de leurs sourires, de leurs succès et de leurs premiers pas de parents. Nous avons partagé il y a huit ans des mois qui nous ont changé. Nous étions à des carrefours, de façon plus ou moins marquée. Mais que nous ayons replongé dans nos études ou changé de pays, aucun de nous n’a repris le fil de sa vie comme il l’avait commencée.
Je vois dans leurs sourires cet avant et cet après. Nous étions des enfants. Huit ans après, et même si la silhouette de E. est toujours aussi fine et élancée, nous avons vieilli. Nous avons pris de l’assurance. Nous sommes devenus des adultes. Et par nos accomplissements, nous sommes aussi devenus « quelqu’un ».
Difficile de prendre conscience de l’âge qui passe. Mais dans leurs sourires, que je ne croise pas si souvent, je vois le reflet de mes propres changements. Nous étions insouciants, et sans doute n’avons nous rien perdu de cette flamme vive de liberté. Mais elle est dissimulée sous les piles de nos responsabilités et de nos ambitions. La flamme est toujours là, je l’aperçois chez chacun de nous, à chaque fou rire, à chaque entrechat qu’un ami se permet dans la rue, quand il croit que personne ne l’a vu. A chaque fois qu’une copine reconnaît s’être époumonée en bobettes sur du Katy Perry. La flamme est là, petite mais intense. Brûlera-t-elle les piles? Pas forcément. Mais elle devrait réchauffer nos vieux os, au crépuscule…
-Lexie Swing-
C’est très touchant…
Emouvant ce regard dans le rétroviseur de la vie.
Ces beaux souvenirs me font penser a la chanson Place des grands hommes ou au film l Auberge Espagnole
Quand on l’écoutait enfant, la place des grands hommes, ça nous semblait loin, loin, et puis il y a eu le bac, et puis la fin de l’université ou de l’école, etc… Et tout à coup ça a pris son sens :)