Son père me manque

Dressage au crépuscule./ Photo   Edoardo Costa

Dressage au crépuscule./ Photo Edoardo Costa

Son père me manque. Il est parti il y a quelques années, alors que je n’étais plus dans les environs depuis longtemps. Mais je gardais, au fond de ma tête d’enfant, ses sourires un peu rares et ses mots d’encouragement. Il était à mes yeux de ces gens qui dispensent conseils et tendresse avec mesure, comme pour leur donner plus de poids.

De lui je n’ai conservé que des visions floues. Parce que j’avais 8 ans, 10 ans, 13 ans finalement, et que les grandes personnes n’avaient qu’un intérêt très relatif dans mon quotidien de pré-adolescente. Et l’impression que j’en ai gardée est teintée des remarques de ma mère, qui louait sa droiture et sa gentillesse.

Car il était ainsi, droit dans la vie comme sur un cheval. Aussi carré dans ses analyses que les pieds de sa monture à l’arrêt. Aussi posé qu’un appuyer. Aussi franc qu’un départ au galop en C. Aussi mesuré dans sa façon de me recadrer qu’un passage sur la diagonale.

Il était de ceux qu’on a connus enfant et perdus de vue, mais dont on se dit de temps en temps, « j’aurais aimé lui dire : tu avais raison d’avoir confiance en moi, ça a marché tu vois ». Ils sont un enseignant, un parent, un mentor de passage. Il était un peu tout ça, à la fois.

Doubler en A. Arrêt en X. Salut. Il a salué, et puis il est sorti. Quand je l’ai appris, la reprise était terminée depuis quelque temps déjà, et je n’ai pu accueillir la nouvelle que les bras ballants.

Son père me manque. Ton père me manque. Je crois que je ne te l’ai jamais dit, ou pas assez. Je pourrais te dire « c’était quelqu’un de bien », mais je dirais plutôt, et je serais alors plus juste, « c’était quelqu’un de rare ».

-Lexie Swing-

3 réflexions sur “Son père me manque

  1. C’est avec beaucoup d’émotion que j’ai lu ces quelques lignes. Peut être parce qu’elles m’ont transportée l’espace d’un instant dans un passé heureux où j’accompagnais ma petite fille au centre équestre.
    Il était le secrétaire, celui qui inscrit les enfants aux reprises, aux stages pendant les vacances et aux concours du dimanche. Je me souviens de la fois où, un large sourire aux lèvres, il m’avait raconté que Lucile et toi étiez parties seules et sans autorisation pour ramener des poneys qui coulaient des jours heureux au pré. Il se devait de vous réprimander mais n’avait pu s’empêcher d’ajouter qu’il était admiratif devant tant d’audace et de complicité avec les équidés.
    Merci Simon.

  2. Très beau texte en effet et un message touchant. C’est beau d’avoir rencontré dans sa vie quelqu’un de « rare ».

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