Deux enfants

Les jolies twins./ Photo Donnie Ray Jones

Les jolies twins./ Photo Donnie Ray Jones

Deux, pour moi, c’était le chiffre idéal. Assez pour avoir quelqu’un avec qui jouer, pas trop nombreux quel que soit le mode de locomotion. C’était l’aboutissement, la famille parfaite. Le reste serait du surplus (mais pas forcément du superflu). J’avais bien géré avec un. Un c’est un chiffre facile. Une bataille facilement gagnée. Le clan enfant est en minorité. Au pire, on se retrouve en tête-à-tête avec l’avantage de la taille, du poids et de la maturité. Deux, c’était les doigts dans le nez. Une simple formalité.

Que dalle.

Deux et ce fut le bouleversement. Les jours de pluie, je vous dirais que c’est la galère. Les jours de nuages, que c’est un « bonheur oui mais… ». Les jours de soleil, je vous dirais que nous sommes au complet, et puis qu’elle est belle, la vie, ainsi, avec elles qui se regardent, se chamaillent et se sourient. Déjà. Je l’imaginais grande soeur. Je le voyais « dad-of-two ». Je m’étais oubliée dans l’équation. Etais-je prête moi? Pas si sûre.

Je les aime intensément. L’une après l’autre. L’une sans l’autre. L’une et l’autre? Ensemble? C’est un autre challenge. Heureusement tout s’apprend, mais éduquer un parent, c’est fatigant…

Nous avons notre petit rythme du matin. Je me douche. Je m’habille. Elle débarque, pieds nus sur le plancher, les bras bien serrés autour de son oreiller. Elle me dévisage. Dans le bain. Devant le lavabo. Assise dans ma chambre en train d’enfiler mes chaussettes. Elle me surprend toujours. C’est rarement tout à fait le moment. Je la prends par la main et nous partons déjeuner. Le sommeil la berce encore, il faut un peu de temps dans les bras de maman pour qu’elle se réveille et attaque ses petits gâteaux préférés. Alors il est temps. Je desserre mon étreinte. Lui jure de revenir très vite. Depuis la chambre de sa soeur je lui parle. « Je mets la couche. Un autocollant. Deux autocollants. La couche est mise. C’est bon chérie? C’est quoi ce bruit? Comment ça un gros dégât? J’arrive… » Sur sa table à langer, la petite mandarine gazouille en agitant furieusement les pieds pour m’empêcher de les rentrer dans les jambes du pyjama. Le bébé sur un bras, je reviens dans la cuisine, essuie la flaque de lait, les traces de chocolat. Je m’assois pour donner le biberon. Pour retirer un bavoir en plastique. Pour souffler, juste un instant. Ensuite il faudra repartir. Poser le bébé. Soulever sa grande soeur. Brosser les dents. Peigner les cheveux. Habiller. Remettre les chaussettes qu’elle aura enlevées. Changer de nouveau la couche. Et peut-être le body si le pipi a fui. Les empoigner à deux. Descendre l’escalier sans trop vaciller. Enfiler les manteaux, les mitaines, les tuques. Moucher les nez, encore. Serrer les bottes, les ceintures des sièges autos. Déposer. Embrasser. Consoler. Embrasser encore. Repartir.

Et puis parfois, le matin prend une tournure dramatique. La couche fuit deux fois. Le terrible two s’empare de Miss Swing qui se traîne en geignant d’une pièce à l’autre en jetant tout objet aperçu sur son passage. La couette dans ses cheveux ne tient pas. Il n’y a plus de culotte dans le tiroir. Le bébé s’est réveillé en même temps que sa grande soeur et hurle son désespoir dans les hauts de la gamme. Le lait n’est pas celui que Miss Swing voulait. Ni le jus. Ni le gâteau d’ailleurs. Le chandail n’est pas joli. Elle veut le leggins gris. Et mettre ses sandales, même s’il pleut à verse. Je râle, je souffle, je crie, je punis, je supplie, je regarde l’heure qui tourne et le temps qui passe. Je voudrais qu’il soit 8h30 alors qu’il est déjà 9h et que nous en sommes toujours au même point. Je voudrais qu’elles soient deux, mais seules.

Il y a ces matins parfaits, où l’on a le temps pour un dernier câlin, pour les rires, pour jouer avec le poupon, pour se laisser faire, pour être d’accord, pour être raccords.

Et puis les autres. Ces maudits autres.

-Lexie Swing-

16 réflexions sur “Deux enfants

  1. Ah la la , mais ça ne me rassure pas tout ça ;) Moi qui me pose la question du deuxième. On me dit que le deuxième c’est plus facile, qu’on est moins stressée, plus sûre de soi ..
    J’ai trouvé que l’arrivée de Rose était un tel bouleversement, j’avoue espérer que le deuxième fait sa place plus tranquillement.
    Mais je me doute bien qu’il y a des moments de rush et de panique ..

    • Ça vient aussi du contexte : la chance a voulu que nous soyons tous les deux pendant six mois pour notre aînée. Ça n’a pas pu être le cas cette fois et ça me remet à une place de parent parfois seul face à mes deux moustiques. Et c’est parfois dur à assumer j’avoue.

      • le jeudi c’est moi qui amène la grande à l’école, donc faut réveiller et préparer le petit frère en plus et c’est un peu la course oui lol. J’ai la chance que le papa puisse l’amener les autres matins donc je ne vais pas me plaindre trop fort non plus ;) bizzz

  2. Pour le coup, tu m’excuse hein, on se connaît pas en vrai, mais j’ai envie de te faire un gros câlin. Parce que toi aussi, tu dois en avoir besoin… Évidemment, c’est ta famille, un bel aboutissement, des beaux enfants, mais oui… on en bave pas mal sur la route. Enfin j’imagine. J’ai de la peine à gérer Mark et la vie quotidienne déjà!

    « Je voudrais qu’elles soient deux, mais seules. » C’est tellement bien dit!

    Courage. Hug virtuel en attendant.

  3. Je suis passée par là et j’y suis toujours avec quelques années (8 ans et demi et 6 ans) en plus et une troisième qui est venue les rejoindre. Deux ans et demi d’écart mais en fait, si proches. Ils peuvent rarement être l’un sans l’autre mais ne peuvent être ensemble sans se chamailler… En grandissant, ils sont complices et se mettent d’accord pour te mettre en retard le matin parce qu’aller jouer dans le jardin avant d’aller à l’école et salir le pantalon y a pas mieux ou par ce que l’un boude à cause de l’autre et a décidé de faire la grève de la toilette, de s’habiller… J’avoue qu’il m’est arrivé de dire « il n’y aura pas de troisième » car ça pu être sport avec la deuxième ! Le portrait n’est pas tout rose. J’avoue que j’ai quelques fois les poils qui se lèvent, et pas doucement, lorsque que je lis « c’est que du bonheur ! ». Non ce n’est pas que ça et justement parce que des fois c’est difficile de se voir renvoyer à la figure son image de « parent parfait que l’on atteindra jamais ! » mais lorsqu’ils se liguent pour te faire des câlins, des dessins ou toutes sortes de cadeaux, ranger leur chambre à leur initiative, s’occupe de leur petite sœur, là, c’est du Bonheur. Et on aime ces moments là parce que justement il y a les maudits autres comme tu le dis si bien.

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