Triste temps

Ceci est un hommage.

A 14h08, samedi dernier, notre avion s’est posé sur le tarmac de l’aéroport Montréal-Trudeau. A 14h10, je rallumais mon téléphone. Au milieu des messages reçus, celui de mon amie qui m’annonçait le décès de son père. Ce n’est pas n’importe quelle amie, comme ce n’était pas n’importe quel père. D’ailleurs ce sont en réalité mes amies, au pluriel, et une grande famille que j’ai eu la chance de côtoyer depuis les premiers mots que j’ai couchés sur des feuilles.

Ces mots que j’écrivais, leur Papa les lisait. Pas à l’époque, probablement, mais plus tard oui. A l’instar de celles et ceux qui, ici, sur les réseaux sociaux ou par message privé, ponctuent mes écrits de leurs réflexions, commentaires et appréciations, il n’hésitait jamais à rebondir, interpeller l’un des membres de sa famille ou partager un passage qui lui avait plu.

J’en aurais écrit mille, des articles, si ça avait pu rallonger le chemin. Je l’aurais pavé de poésie, de doux et d’espoir. Mais même les mots les plus rares n’ont pas ce pouvoir.

Je ne savais pas tout de lui, pas grand chose même. Vous savez comment c’est, les parents de nos amis. On entre chez eux sur la pointe des pieds, attendant dans l’ombre, statufié, de se voir désigner une heure, un espace, un coin de table où l’on sera les bienvenus. Et puis on revient, jour après jour, année après année, à mesure que les amitiés grandissent. On s’invite pour tout, pour rien et un jour, on est comme chez soi. Je ne savais rien de plus de lui que ce que l’enfance avait su voir : une voix, une stature, une place à table, un rire, une façon de s’adresser aux siens. Mais lorsque, plus tard, la vie a fait son oeuvre et remplacé nos pitreries d’enfants par des préoccupations d’adultes, j’ai emporté dans mes bagages la sérénité qui se dégageait de cette vie, la bonhommie avec laquelle on m’accueillait et le sentiment que, si je me perdais un jour, le Nord pourrait sans peine se trouver à leur table.

A l’entrecroisement des mers et des terres, il y a parfois un phare qui brille plus que les autres. Et lorsque la lumière s’éteint, alors c’est tout un équipage qui doit réapprendre à se guider à la lueur des étoiles. Je souhaite à mes amies et à leur famille tout le courage possible pour faire face à cette épreuve.

-Lexie Swing-

Photo : Justin Pauley

4 réflexions sur “Triste temps

    • Je crois oui, je me suis parfois posée cette question : quel souvenir de moi garderont-ils plus tard ? Il y a toujours des gens qui nous marquent plus que les autres.

  1. Ces nouvelles font souvent revenir les souvenirs sur la table.
    C’est vrai que certaines personnes comptent plus que d’autres dans nos parcours de vie. Et leur départ crée souvent un grand vide

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