
Playing with water./ Photo Fred Mancosu
Avec l’enfant vient la maturité. Que je croyais! La paperasse de naissance, les nuits hachées, les tarifs de garderie et ceux des paquets de couches… Tout ça te conditionne à devenir adulte, à enfiler pantalon serré et veston ajusté, à jouer un rôle calculé, moitié visage las (les nuits) moitié moue perturbée (le rhume qui perturbe les nuits est il la conséquence d’une détresse enfantine due à une naissance à 9h55 par césarienne plutôt qu’à 10h35 par voie basse?)
Mais tout ça n’est que façade! Personne n’est plus innocent qu’un parent. Applaudir un caca, brailler une poule sur un mur, chercher les flaques d’eau pas trop profondes mais un peu, pour sauter dedans. Choisir, à cet effet, les plus belles bottes de pluie, s’extasier devant une maison de poupée « comme on aurait voulu avoir enfant », pleurer devant un dessin animé, courir en rond, sauter haut, jouer à la cachette et clamer « 8, 9, 10, tu es bien caché? Je vais te trouver! » Et se planquer au fond d’un placard, le souffle coupé et la tête dans les manteaux, avec la même pointe d’excitation que lorsqu’on avait 8 ans.
Et puis redevenir adulte. Dire mais-oui-mon-chéri-je-te-vois sans lever la tête d’un livre. Disputer parce que la boue a taché un pantalon durant la grande invasion des cowboys par les indiens. S’interroger « la poule ne devrait-elle pas picorer plutôt que picoter? » Crier « on a dit pas la tête la première sur le toboggan ». Prévenir qu’à force de tourner, on pourrait tomber. Consoler en disant « je t’avais prévenu que tu allais tomber ». Refuser de lire Tchoupi et Petit Ours Brun parce qu’ils véhiculent des concepts éducatifs douteux. Choisir les livres avec des images rétro-baroques et des textes en alexandrins. Faire répéter un, deux, trois, quatre, cinq, six… Et demander : c’est quoi cette couleur là? Ajouter bravo tout le temps. Tu es capable. Tu es courageux. Essaye. Goûte. Il faut toujours goûter.
Réaliser que ca prend de la maturité pour réaliser. Qu’il faut toujours goûter. Ne pas se tacher. Éviter les flaques et les heures de télé. Qu’à trop tourner on finit par tomber. Qu’on est courageux. Qu’on est capable. Et puis s’amender. Dire pardon tu as raison ce n’est pas si grave. Viens on va jouer aux Indiens. Je te lirai Petit Ours Brun en faisant la grosse voix du papa. Et on tournera jusqu’à s’écrouler. On rira. Mon pantalon sera plein de boue. Je te promets de ne pas soupeser dans ma tête le risque que ça encrasse la machine à laver. Redis-moi, déjà, comment on joue à chat?
-Lexie Swing-
Superbe, comme toujours. Et je m’y reconnais. Le plus drôle c’est la poule qui picote : j’ai fait la recherche du terme « picoter » sur internet car Tchoupi m’énervait à dire picoter et non picorer !
Je ne comprends pas cette chanson je te jure! Et c’est pas la seule d’ailleurs, y’en a deux trois qui font fi de toute règle de grammaire!
Encore un magnifique article ! Je me régale, merci !
Merci beaucoup :)
Comme toi, j’oscille entre mes responsabilités d’adulte et l’envie parfois de retrouver mon âme d’enfant. Je peux me fâcher rapport au bazar dans la cuisine (quel con a donné des chips à Mark, franchement!!), mais encourager Mark à renverser la panière de jeux parce que je me souviens très bien du plaisir qu’on a à farfouiller là-dedans. Adult life is overrated… des fois je me dis, « mais pourquoi c’est moi qui doit être l’adulte?? »
Moi je me dis «mais c’est quoi au fait être adulte, ça arrive quand?»