De la neige douce sous les pieds, un sac à dos rempli de courses et un bébé solidement arrimé sur ma poitrine. C’était moi, hier, quand Tempête s’est levée fiévreuse et qu’il a fallu agiter le drapeau blanc le temps de la requinquer. Parce que justement, elle se remonte en un tour de clé et que la musique est vite repartie, j’ai profité de cette journée off pour la sortir un peu. Fièvre oblige – oui, E. est de ces enfants que rien n’arrête, même 40 de fièvre – je l’ai transportée dans le porte bébé afin de lui épargner le chemin plein de la neige qui s’était amoncelée la veille (25 cm si j’en crois la météo).
Nous sommes parties, cahin caha, moi titubant un peu dans la neige, elle, la tête renversée en arrière, bouche ouverte, tentant d’attraper au vol les quelques flocons qui flottaient encore dans l’air. J’ai déambulé dans les différentes boutiques de Saint-Bruno auxquelles je projetais de me rendre. À l’épicerie, la caissière m’a écartée d’un geste et a rempli avec bienveillance mon sac à dos, le transportant jusqu’à mes épaules pour m’éviter une rotation compliquée. Ainsi chargée, je me suis alors dirigée vers ce petit café dont j’avais entendu parler sans jamais y mettre les pieds. J’y ai croisé la vie de Saint-Bruno, des clients visiblement fidèles, sinon habitués, qui sirotaient leur dose quotidienne. Des gens plongés dans leur journal, dans leur livre, sur leur cellulaire ou dans leur conversation. J’ai aimé ce monde là – et le café était délicieux, ce qui ne gâche rien. Je suis repartie mon gobelet à la main, les yeux perdus dans le ciel bleu.
Je ne suis pas fille à avoir des regrets. Pas même de la nostalgie. Comme si le temps s’évanouissait dès lors qu’il se conjugue au passé. Mais les pieds dans la neige et le cœur léger, j’ai regretté. Regretter les premiers mois de ma deuxième née où mon esprit fugitif avait pris la décision de saborder ma vie de mère. Où j’aurais tout donné pour sortir de cette routine, de cette ville, de cet hiver là, et me retrouver entre les quatre murs d’un bureau. Un bureau que j’ai détesté, sitôt retrouvé, parce que je n’avais toujours pas fait la paix, et que mon esprit, mon cœur et mon corps se livraient une lutte sans merci.
J’ai regretté parce que j’aurais pu profiter. Les conditions étaient réunies et la neige était bonne. On aurait pu s’en donner à cœur joie, elle et moi. On aurait marché dans la neige un café à la main. On aurait fait l’épicerie, en s’appuyant sur la bienveillance du genre humain. On aurait eu du fun.
Bien sûr, ce n’est pas mon tout petit bébé que je traînais hier. Ce bébé ci fait presque 10 kilos et il parle. Il m’invective et me poursuit dans la maison en criant « Papeauuu » ma tuque à la main lorsque j’oublie de me coiffer pour sortir. Il dit bye d’une voix caverneuse à la sortie de tous les magasins. Il me pince le nez quand je le porte dans le porte bébé, quand il n’essaie pas de visiter une de mes narines. Il tient debout devant la porte, tandis que je me déharnache. Et une fois à l’intérieur, il envoie valser ses bottes et court vite se jeter sur le sofa du salon.
C’est un autre hiver, un nouvel hiver. Et qu’importe le temps qu’il fait dehors, il fera toujours moins froid dans mon cœur que l’hiver dernier. Je regrette d’être passée à côté de ces moments mais je ne voudrais pas y revenir. Le présent est bien plus beau. Mon bébé est devenu lourd à porter mais mon cœur est tellement plus léger que mon corps à trouver son équilibre.
Et puis je n’oublie plus de mettre ma tuque en sortant.
-Lexie Swing-
Bonne St-Valentin ! Encore plein plein de petits moment doux… sans regret ;-)
A vous aussi :) vous avez quelque chose de prévu pour l’occasion ?
Parfois c’est compliqué de profiter de ce qui s’offre à nous parce que notre esprit est ailleurs, que notre coeur est un peu perdu Lexie. Pas de regrets, je crois que c’est le mieux.
Moi je regrette d’avoir si mal vécu le manque de sommeil avec ma deuxième! Pourtant ça n’a duré que six mois mais quand tu ne sais pas que ça va s’arrêter au bout de 6 mois, ça paraît interminable et tout prend une tournure grise! Avoir un 3e, je me répéterais plus « ça s’arrêtera un jour » je crois pour essayer d’être plus zen/détachée, si tant est que ce soit possible quand tes journées commencent à 4h30 du matin!
Je trouve que tu soulignes un truc important : c’est dur parce qu’on ne sait pas quand ça va s’arrêter. Si tu avais une date fixe, ça ne serait pas la même chose. Ça me fait penser – je digresse à souhait – à ceux qui sont retenus en otage. Quand ils sortent au bout de quelques mois on se dit « ça va c’était pas si long » mais quand tu es dedans, ça te rend dingue car tu n’as aucune espèce d’idée du temps que tu vas rester là. Tu peux compter les jours mais tu ne sais pas si ça va s’arrêter demain ou dans dix ans …
Je te souhaite de profiter pleinement de tous les moments à venir! N’aie pas de regrets! À part nous plomber le moral ça ne sert à rien 😉 Bravo pour ce très joli texte😘
Non tu as raison, j’ai toujours trouvé qu’on avançait pas beaucoup, avec des regrets ..