Le rose a longtemps été exclu de la garde-robe de ma première fille. Écœurés par les dégradés réduits (rose pâle/rouge framboise/fushia/mauve) et les jouets genrés, nous avons coupé court dès l’annonce de notre première grossesse par le biais d’une véritable campagne de terreur visant à éliminer tout désir d’offrir à notre progéniture quelque vêtement rose que ce soit. Non seulement cela a fonctionné, mais les gens s’excusaient : «Je suis désolée il y a quelques pois roses sur la poche arrière droite», ou «Le smock est blanc rosé mais je peux le découdre si tu préfères». Avec le recul, c’était un poil mesquin de notre part, mais à l’époque nous avions l’impression que cela était nécessaire pour éviter de se retrouver avec une garde-robe unicolore. Et avec raison : les quelques personnes non-prévenues nous ont invariablement offert du rose.
Est-ce parce que toutes les personnes pensent que les petites filles doivent porter du rose? Oui, mais pas seulement. La société bien sûr a codifié cette impression. Et le choix en lui-même reste restreint. Tous les parents qui ont souhaité gardé la surprise du sexe en ont fait l’expérience : au royaume du vêtement pour bébé, le mixte n’existe pas (pas beaucoup disons, restons quand même honnêtes) ou c’est un sac de jute. J’entends par là que le mixte, ou le non-genré, est forcément jaune ou beige.
Nous avons donc travaillé ardemment à offrir autre chose à notre fille. Pas parce que nous voulions changer la société par son biais, mais plutôt pour que ses goûts ne se limitent pas au rose, aux robes, aux paillettes, aux smocks, et aux leggings.
Pour les leggings, c’est foutu.
Mais pendant longtemps, le stratagème a fonctionné. Au milieu d’une marée de petites amies déguisées en princesses à l’Halloween, notre B., déguisée en super-héroïne, scandait : «Moi, z’aime le blue».. Et fiers parents que nous étions alors (on est toujours un peu cons, quand on est parent, on s’enorgueillit de choses surprenantes).
Et puis le vent a tourné : elle s’est mise à réclamer des chats, à quémander des paillettes et surtout, surtout, elle s’est mise à aimer le rose. Pire : c’est devenu sa couleur préférée. Et insidieusement, j’ai moi-même commencé à en acheter de plus en plus. Après tout : qui n’a pas envie de «faire mouche» avec son enfant et de voir le bonheur dans ses yeux alors qu’il déballe son quinzième chandail acheté pour la rentrée?
Ça m’embêtait un peu, quand même, cette histoire de rose. Mais je me disais que c’était hors de mon contrôle. La garderie, les amies, avaient eu finalement raison de ses préférences.
Un midi, je me suis retrouvée dans les allées du magasin Old Navy. Pas très cher, et avec des messages sur les pyjamas assez féministes (côté fille en tout cas) comme «Offrez-lui une belle nuit de sommeil afin qu’à son réveil elle soit capable de déplacer des montagnes» (en anglais, c’est plus court ;)) ou «Smart girl». Mais force est de constater que le rose est souvent de mise.
Le matin, j’avais proposé un chandail orange et vert à ma fille, qui m’avait aussitôt tancée : «Ça, c’est pour les garçons». Et tout à coup je me suis réveillée. Mes discours du type «Il n’y a pas de vêtements pour les garçons ou pour les filles, tu peux porter ce que tu veux» n’avaient aucune valeur, puisque moi-même je ne lui offrais pas cette possibilité. Il y avait des couleurs qui devaient être pour les garçons puisque ces couleurs-là, je ne les lui faisais pas porter.
Même sans voir l’enfant qui les porte, la société nous a conditionnés à juger si un vêtement est «de fille» ou «de garçon». Et je ne parle pas d’une jupe ou d’un boxer, mais bien de la couleur ou de la forme. Le rose, les pois, les nœuds, le violet, sont «de fille». L’orange, le vert (foncé surtout), le marron, les formes larges, sont «de garçon».
Ce midi-là, hésitant entre des étoiles et une sirène, j’ai fait deux pas sur la droite et j’ai commencé à évaluer les pyjamas «de garçons». Je faisais la moue. Ils avaient tellement l’air «de garçons». Je me retrouvais à lutter contre mes propres démons et me trouvais soudainement ridicule.
J’ai finalement attrapé un ensemble bleu nuit avec des planètes dessinées en vert. J’espérais ainsi séduire ma fille dont la garderie décline l’ensemble de son organisation ainsi que le nom de ses groupes en rapport avec l’astronomie. Fière de mon choix, je me suis alors dirigée vers les chandails. Plus compliqués, car «portés en publics». Lequel accepterait-elle d’arborer? Quels choix pour une transition en douceur?
J’ai sorti du lot un chandail assez large, avec des manches longues cousues dans des manches courtes. Un chandail bleu chiné, avec des manches longues grises et sur le devant, le S de Superman. Il se trouve que ma fille, si elle aime les super-héros, les apprécie principalement par le biais de ses amis garçons. Ainsi Spiderman et Batman n’ont plus de secrets pour elle. Mais puisqu’on parle peu des super-héroïnes aux garçons, et qu’eux-mêmes s’identifient plutôt aux hommes, ce qui est normal, ma fille elle-même ne se transforme, lorsqu’elle joue, qu’en Spiderman ou autre.
Ce soir-là, lorsque j’ai ramené les vêtements pour ma fille et qu’elle a ouvert le paquet, j’ai vu dans ses yeux, et à la forme de sa bouche, ce «O» de surprise conquise, que oui, j’avais fait mouche. À 4 ans, elle a encore le désir d’aimer les mêmes choses que ses amis. Tous ses amis. Garçons compris.
C’est donc avec bonheur que, dès le lendemain matin, elle a enfilé ses leggings (on ne se refait pas), ses baskets violettes et son chandail Superman. À notre arrivée, nous avons croisé l’un de ses camarades, qui a eu LA réaction que je n’aurais même pas espérée : «Wow Maman, t’as vu le chandail de B.? Comme il est beau? Maman je veux ce chandail! Elle est trop cool B.! »
Ma fille avait tout à la fois enrichi sa garde-robe et créé un nouveau pont avec des amis, un ami du moins. L’expérience était un succès!
Désormais, j’essaye de faire fi de mes préjugés et de glaner les vêtements dans toutes les sections de son âge, en m’attachant à des dessins ou des couleurs qu’elle aime, en faisant fi de l’agencement des couleurs, de la forme, ou des détails.
Et de son côté, la société avance : déjà deux fois que je relaie la décision de boutiques de vêtements pour enfants de cesser un étiquetage en fonction du genre. Juste laisser les gens décider ce qu’ils trouvent jolis, ce qu’ils ont envie de porter, sans se sentir nécessairement hors-norme parce qu’on aime les vêtements un peu larges ou les pois roses.
-Lexie Swing-
Je suis d’accord avec toi, c’est unepu une mine les trucs pour enfants. C’est l’anniversaire de ma niece dimanche, et je veut lui offrir des playmobil ou des legos. Mais hors de question de lui offrir des trucs de filles / princesses etc!
C’est marrant parce que mon frère et sa femme sont un peu (trop) obsedes de la mode pour leurs enfants. tout doit etre impeccable, repasse, a la mode et aller ensemble tout le temps. Meme les jouets doivent aller avec la deco! Mais au moins tout est plutot dans les tons neutres et doux, donc pas de rose :P
Et sinon je me faisais la reflection hier que pour les hommes c’est injustes. Je peux tout a fait emprunter un jeans a mon Ecossais (ca me vaut meme des compliments!), ou sortir avec sa veste de bucheron a carreau sur moi. Mais si il se mettait a emprunter mon gilet moulant a col V, ou une jupe…. Ben ca ne passerait pas aussi bien
Oui ça n’est pas du tout aussi bien vu ! Et c’est drôle pour ton frère mais j’étais un peu comme ça aussi, je ne voulais que des jouets en bois pour que ça fasse joli dans la chambre. Maintenant j’ai un peu laisser tomber ;)
Alors pour les fringues, pas de problèmes chez nous. Je n’ai jamais habillé Mark en bleu (enfin, il a forcément des trucs bleus, mais pas dans le sens où « regardez, il a un pénis, c’est un garçon! ») et dans le culture chinoise, le rouge est prisé donc on a de tout. Par contre, il y a nettement moins de choix de vêtements et chaussures neutres ou au moins pas « princesse ». Parce que franchement, je veux bien bousculer les clichés, mais je ne vais pas lui acheter non plus un t-shirt rose à paillettes :-/
Mark semble toujours aussi peu intéressé par ces histoires de genre masculin/féminin. Il inverse souvent « he » et « she » d’ailleurs, et voudrais bien du vernis à ongle (chose qu’il peut déclarer en fracassant des voitures contre le mur).
J’ai plus de mal avec les jouets. Là, on tourne autour de trucs de « gars », des voitures, des super héros, etc. Même les LEGO sont très clivés, boîtes roses avec des personnages pour les filles, boîtes bleues pour les gars.
Oui c’est vrai que c’est très genré. Ça en fait même, physiquement, mal aux yeux, tellement c’est unicolore. Est ce qu’il aime toutes sortes de jeux ou il ferait la gueule devant un lego princesse ? Je t’avoue que je n’irais pas acheter un lego princesse ou un lego friends d’ailleurs, ni a une fille ni à un garçon. Pour moi les legos c’est de la construction right ? On a une boite de trucs mélangés et il y a un peu toutes les couleurs
J’ai eu exactement la même chose à la maison. Et finalement imposer ne sert à rien car on veut que nos enfants soient autonomes! Donc il faut jouer sur la diversité. Montrer toutes les possibilités et laisser l’enfant trouver sa place dans son environnement. Malheureusement on ne peut pas être là tout le temps et il faut qu’ils évoluent à leur manière. Mais j’en conviens, c’est pas facile! Mais il y des surprises! Check mon post sur carnaval cette semaine!😉
Ah ah je vais regarder ça merci !
Hello je découvre ton blog et la j’adore tu dit : ( laisser les gens décider ce quilles trouvent jolis ) je suis pour a 100 % moi qui aime les jupes comme les filles aiment les pantalons je peut pas les portés en public je trouve ca dommage non ? bises …………