Deux heures à perdre pour rentrer chez soi… c’est l’histoire d’une drôle d’aventure. Vendredi soir, au 3e jour à jongler avec l’absence de train, je me suis glissée dans la ligne de bus express recommandée par une amie. Partie tôt du bureau, je suis arrivée sur le fil, suffisamment en avance pour faire partie de la soixantaine de chanceux à embarquer. Décontraction musculaire et abandon de mes multiples sacs sur le sol du véhicule – le vendredi est de ces jours où la pression retombe comme un soufflé mal cuit.
17 minutes plus tard – le trajet a été rapide et la soirée s’annonce prometteuse – je texte mon amoureux qui m’attend déjà au stationnement de l’arrêt du bus, une étape rendue obligatoire par la situation exceptionnelle des derniers jours. L’arrêt s’annonce, la personne à côté de moi fait mine d’ignorer mes signes, pour finalement se jeter dehors sitôt l’autobus arrêté. Je la suis cahin-caha en la maudissant quelque peu, traverse le carrefour hyper achalandé et rejoint la voiture familiale. Je m’échoue plus que je ne m’assoie sur le siège passager, aussitôt apostrophée par les exclamations et questions de mes enfants. Pourtant dans mon esprit c’est le silence qui se fait : qu’ai-je fait de mon sac de magasin, rempli de cadeaux, matériel d’art et dans lequel j’ai aussi fourré au dernier moment des papiers personnels confidentiels?
L’amoureux met les gaz et j’enclenche l’application de suivi des transports qui permet de géolocaliser les trajets en cours. L’autobus se trouve déjà à une dizaine de kilomètres. Tandis que mon conjoint se lance à sa poursuite, je tente de trouver un numéro de téléphone actif, une aiguille dans une botte de foin bien serrée un vendredi soir. Une dame me répond que si mon sac est retrouvé il sera probablement aux objets perdus lundi matin. Je sais ce que ce « si » signifie, j’ai un paquet de choses qui ont trouvé meilleur acquéreur après les avoir oubliées dans des endroits publics. Je ne peux pas prendre la chance de laisser mes documents et les cadeaux sont pour un anniversaire qui a lieu le lendemain. Au bord de l’apoplexie, je tente un nouvel appel. « Les autobus reviennent au terminus ensuite s’ils ont fini leurs parcours ». Un seul autobus de la ligne reste encore à partir, quelque 20 minutes plus tard, soit le minimum pour nous pour rejoindre ledit terminus.
Demi-tour serré et pied au plancher, l’amoureux met le cap vers la ville d’où j’ai embarqué. « Ça va Maman? », demande ma grande fille à l’arrière devant mon teint livide. « J’ai encore espoir », je lui promets.
Au terminus, il reste une minute avant le départ du dernier bus. Je me jette hors de la voiture, pense à féliciter le hasard qui a passé le feu piéton au vert quelques secondes avant mon arrivée, et me jette sur le chauffeur. Ce n’est pas lui.
Il ne peut pas entrer en contact avec les autres chauffeurs, il ne sait même pas qui était dans les autres autobus ce soir là. « Il peut avoir fini ou avoir changé de ligne », m’explique-t-il. Le désespoir commence à me gagner. « Adressez-vous à l’agent ici », me propose-t-il en désignant un homme sur le quai.
Cet homme – je rompts le suspense ici – sera celui de la Providence. Devant mon air déconfit, il appelle « le terminal », m’indiquant au passage qu’une partie des autobus de cette ligne sont ramenés dans une autre ville. Ils ont l’heure du départ mais pas le numéro du bus. Il me fait saisir un numéro de téléphone – celui de son chef, qui pourra me contacter lundi matin pour me remettre mes affaires si elles ont été retrouvées. Je trépigne. J’insiste. Ne rien lâcher surtout. Il me dévisage. « Je rentre au terminal bientôt de toute façon. Si quelque chose a été retrouvé, je vous appelle ce soir. Sans faute. Donnez-moi une heure. »
54 minutes plus tard, mon téléphone sonne. « J’ai une bonne nouvelle », dit-il. Il a le sac en sa possession, je pourrais le récupérer en début de semaine puisque le terminal est désormais fermé. Mais je ne peux lâcher si prêt du but. « Je peux être là dans dix minutes ». Je n’y serais jamais en si peu de temps. « 15 plutôt », je me corrige. « Ok, je vous attend dans la ville voisine, j’aurais ma voiture privée, attendez-moi sur les quais de débarquement ».
Lorsque je descends de ma voiture, 15 minutes plus tard, j’ai dans mes mains une boîte de chocolats, récupéré à l’épicerie un peu plus tôt. J’ai surtout, au bout des lèvres, une reconnaissance énorme. Il dit « je pars en vacances la semaine prochaine », et puis « fallait pas pour les chocolats ». Et même si je me sens coupable de lui avoir fait faire tout ça, je garde en tête qu’on se sent toujours un peu plus heureux après un beau geste ou une bonne action.
Alors j’espère qu’il est parti aujourd’hui en congés le cœur plus léger parce que de mon côté, c’est un sacré poids qu’il a enlevé de mes épaules ce soir là.
-Lexie Swing-
Oh la la quel stress, quel suspense!
Heureusement qu’il y a encore des personnes qui ont le sens de l’autre.
Je ne me souvient même pas du nombre de fois où j’ai oublié quelque chose d’important dans le bus.
À force j’ai appris à écouter cette petite voix qui me dit « tu ne devrais pas mettre ça ici, tu vas l’oublier », parce que 9 fois sur 10 c’est effectivement ce que je fais lol
2 remarques:
Les Québécois sont vraiment des gens serviables et irremplaçables.
Egarer des objets personnels est une constante chez toi. Confère l’été 2000 au fin fond de l’Espagne où tu avais réussi l’exploit de laisser ton téléphone portable dans…une cabine téléphonique locale !!!
Ne change rien, tu es unique…
Je sais, c’est ma meilleure anecdote aussi :)
Quel stress ! J’ai vu des touristes dans un état pas possible parce qu’ils venaient de se rendre compte qu’ils venaient d’oublier leur sac de courses dans le bus qui venait de démarrer. Ils ont essayé de courir derrière le bus, tandis qu’une personne téléphonait à la compagnie de bus pour qu’on avertisse le conducteur de regarder dans le bus; on ne pouvait mieux faire.
Amitiés :)
C’est toujours un moment de stress important! Tu ne peux pas rejoindre le chauffeur généralement.