Et puis après ?

Et puis après ? On dirait du Musso dans le titre. Ça doit être parce que je suis assise dans le train en direction du boulot et que j’écoute Taylor Swift. Un goût de déjà vu.

Je retourne au travail pour la première fois depuis quatre mois, pour la troisième fois en un an. Je peux les compter sur les doigts d’une seule main et il m’en resterait encore deux en rabe, pour les cas d’urgence.

Alors que le monde occidental s’ébroue, légèrement hébété, devant la perspective d’un « retour à la normale », je me fais l’effet d’un Shetland rétif devant un obstacle à sous-bassement (ceux qui savent …). Je prends volontiers les barbecues entre copains et les verres de vin en terrasse, je prends les voyages à l’étranger et l’insouciance d’être. Mais tout ce qui suppose que l’on puisse retourner, revenir, à la vie d’avant, me paralyse.

C’est que, vous voyez, nous avons plutôt été choyés dans notre ville de banlieue. Nous avons vécu les durs mois de confinement total à l’abri de notre cour ombragée. Nous avons déambulé dans nos rues suffisamment larges pour pouvoir s’y croiser. Nous avons profité des parcs, des pistes cyclables, des commerces locaux qui ont rapidement pris l’habitude d’offrir des services de pick up et livraison.

Surtout, nous avons pris l’habitude d’une vie dont nous n’aurions jamais pu rêver. Nous avons désinscrit nos enfants du service de garde, nous avons installé nos bureaux à deux étages différents et la machine à café au milieu. Les abonnements de train ont été désactivés au profit des abonnements de tennis. Et lorsque les enfants passent la porte, il est tout juste l’heure de goûter, toujours l’heure de jouer. Il est l’heure de vivre et c’est surtout cela que nous a apporté cette année : le temps d’exister.

Alors revenir, retourner vers l’urgence? Revenir aux matins toujours pressés, aux enfants déposés sur un bout de trottoir, à la routine tardive qui compile devoirs, bain et repas en une heure de temps. Fermer la maison pour 8 heures pour se glisser dans une autre vie, l’autre, la professionnelle, et puis rouvrir, inspirer, recommencer. Chaque jour, cinq fois par semaine. Le bal est incessant et les pas rompus. Le bal a cessé et je ne souhaite guère recommencer.

Nous survolons le Saint-Laurent, à l’heure où le soleil du matin dore la surface vive de l’eau. Mon regard s’attarde parce qu’il est renouvelé, surpris. Le flot du quotidien ne tarit plus l’intérêt. Cette route est un détour et plus un passage obligé duquel on se protège, tête baissée sur nos écrans.

Seule l’avenir nous dira si nous vivrons le monde d’après ou reprendrons la vie mise entre parenthèses. Je pense qu’à l’échelle de notre monde, il serait temps d’écrire un nouveau chapitre.

-Lexie Swing-

5 réflexions sur “Et puis après ?

  1. Peut-être qu’à un moment je sentirai un manque de quelques moments exceptionnels ou d’une certaine organisation dans l’urgence de la pandémie, mais je suis encore dans la vie au jour le jour et dans une situation trop inconfortable pour voir l’après.

    Chui bloqué sur le chapitre actuel, quoi.

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