
Le temps s’arrête./ Photo Simon LeBlanc
6h. Si tôt et déjà trop tard. Trop tard pour être à l’heure. Trop tard pour prendre le train. Trop tard pour commencer le boulot à 8. Trop tard pour réaliser le combo douche-déjeuner avec sérénité. « Prends le train suivant », propose mon chéri. Je dis non. Partir pour 8h30 signifie finir le travail plus tard. Et puis je suis plus efficace le matin tôt. Et puis j’ai les courses à faire ce soir. Et puis on sera en retard pour préparer le souper. Et puis tandis que je reste là, à deviser, le temps file et je ne fais rien. Je dis oui. Oui, d’accord, le train d’après. Il est 6h45. Le petit déjeuner vient de commencer. Je vois ma fille compter ses petits gâteaux. Déglutir son verre de lait. Vais-je vraiment l’arracher à ce moment pour une question d’horaire, de courses et de productivité matinale ?
Je m’assieds à ses côtés. Verse mon yogourt. Mes céréales maison. Ajoute les canneberges. Touille consciencieusement. Tu as rêvé cette nuit ma chérie ? Elle hoche la tête, la bouche pleine. Sait-elle seulement ce que signifie rêver ? Son petit visage enrhumé est tout sale. Cela prendra du temps de la nettoyer, le temps d’expliquer, de maintenir, de supplier, pour moucher le petit nez douloureusement collé et nettoyer l’œil qui pleure sous les assauts des microbes. Quel choix ai-je? La ceinturer sur le lit, en lui criant « laisse-toi faire, on va être en retard! »?
Il y a quelques mois, j’ai lu le témoignage d’une autre mère, qui s’était rendu compte de ce qu’elle imposait à ses filles lorsque, sur le chemin de l’école, alors qu’elles se hâtaient, l’aînée était venue houspiller la cadette qui humait une fleur : « Mais dépêche-toi, dépêche-toi, qu’est-ce que tu es lente! ». Elle avait 7 ans et elle était déjà pressée. Elle avait 4 ans et elle ne pouvait prendre le temps de rêver. Ça lui a fait un choc, à la mère. Et ça m’a fait un choc, à moi aussi. Car je sais qu’on pourrait être comme cela. Des gens toujours en retard qui transmettent leur stress du temps à leurs enfants.
Désormais, on la lève plus tôt, pour qu’elle ait le temps de se réveiller. On déjeune à trois, pour avoir le temps de partager. Et quand on peut, ou du moins chaque fois qu’on peut, on repousse l’heure du départ. Et c’est alors l’occasion de ralentir ses gestes, de regarder par la fenêtre, de faire un jeu supplémentaire ou simplement de réaliser nos petits actes du matin un à un, et non pas la brosse à dents dans la bouche et le peigne de l’autre, avec cette maladresse propre à ceux qui voudraient tout faire mais n’ont le temps de rien.
Ce n’est pas encore tout à fait gagné. La miss part souvent mal peignée. Et j’oublie sans cesse de remettre dans mon sac le livre que j’ai commencé la veille au soir. Il n’est pas rare que l’on se mette à courir en croisant l’horloge… et je rate encore mon train souvent!
On ne peut pas arrêter le temps, mais on peut le ralentir, juste un peu. Desserrer son étau, l’espace d’un instant, pour humer une fleur ou compter ses gâteaux.
-Lexie Swing-
Ralentir un peu, oui ça fait du bien Lexie. Même si le matin, on court toujours un peu. J’ai entendu un pédopsychiatre dire qu’il ne faudrait jamais dire « dépêche toi à un enfant ». Il faut anticiper, prendre le temps, car chaque minute est précieuse et surtout importante pour l’enfant qui grandit et pour qui le temps n’a pas la même définition. Pas toujours facile à appliquer. Mais on peut essayer (et tant pis pour le coup de peigne manqué)!
Les educatrices la recoiffent toujours de toute façon ;)
Excellent article ! Des mots justes qui décrivent fort bien notre quotidien : toujours pressés, multi-tâches, pestant contre le temps qui passe trop vite tout en se projetant sans cesse dans l’avenir… Notre existence est bien paradoxale !
Oh oui je suis pas mal comme ça : à me languir toujours de ce qui vient après!
J’essaie d’éviter de dire « dépêche-toi » mais avec deux, ça devient de plus en plus compliqué…
Par contre, tu n’as pas pensé à prendre le bus express plutôt que le train? C’est plus loin mais au moins ils passent aux 5 minutes….
Je prends le bus quand je loupe le train. Mais il me dépose au métro de Longueuil, donc je dois encore prendre la jaune puis la verte pour arriver au boulot :)
Mais tu ne peux pas aller en voiture jusqu’à Chevrier par exemple? Parce que là c’est 15-20 minutes de bus pour être à Bonaventure et il passe aux 5 minutes. Nous on habite proche de Carignan et on fait ça tous les matins.
Non depuis Saint Bruno ça me rallongerait. Vs avez le train depuis Carignan sinon ? Je mets 25 min jusqu’à Bonaventure en train, et le même temps en bus + métro (mais deux changements comme je te disais), par contre le bus est au bout de ma rue et le train juste à 5 minutes en voiture. Ça vous plait Carignan?
On est à St-Hubert en fait mais à la frontière de Carignan et Chambly. Oui on aime beaucoup, c’est très calme, piste cyclable et parc au bout de la rue, on a un bus direct pour le centre-ville sauf que comme on fait le trajet avec nos deux minis, ça fait trop long. C’est pour ça qu’on fait le combo voiture+bus express, ça leur permet de ne pas été trop chiante même si en terme de temps, ça en revient au même! :)
Et toi, tu aimes St-Bruno?
Je suis du genre efficace quand je suis en mode « getting shit done », c’est à dire quand je fais les repas, les tâches quotidiennes, etc. Mais j’ai vite appris à ne jamais presser Mark, même si je meurs d’envie d’accélérer, parce qu’il se braque et le temps qu’il pleure et tout, ça retarde d’un bon quart d’heure… de plus. Logique :lol:
Son père est plus zen, donc il prend le relais pour que je fasse ce qu’il y a faire pendant que les gars font les zouaves sur le canapé!
Arf je suis bien d’accord avec toi, souvent les presser ne sert à rien, c’est encore pire!