L’été approchant, les posts habituels fleurissent sur ma page Facebook. « Ne m’abandonne pas pour les vacances » est souvent le message, flanqué d’un chiot aux yeux élargis par la peur et ligoté à un arbre sur le bord de la route.
On sait aujourd’hui que les gens qui abandonnent leur animal au départ des vacances sont souvent les mêmes qui investissent dans un chiot Noël venu. Ces mêmes gens que les mêmes associations préviennent alors : « Je ne suis pas une poupée, je suis un animal ». Mais rien n’y fait.
Il y a cinq ans je rêvais d’un chiot poilu et doux, qui m’aimerait d’un amour démesuré et m’accompagnerait partout. J’attends toujours. Je ne perds pas espoir. Un jour je connaîtrais peut-être ce chien là. Mais pas tout de suite. Mon chien est effectivement poilu et doux. Et extrêmement chiant aussi. Personne n’imagine se retrouver avec un cas social comme chien de compagnie. Un chien mi-autiste mi-claustro.
La semaine dernière j’ai passé une journée de télétravail avec lui. Je l’ai souvent contemplé ébahie. Lorsqu’il est parti se cacher dans la chambre du bébé parce qu’il avait entendu le camion-poubelle. Lorsqu’il s’est terré sous la table pour ne pas sortir faire ses besoins dans le jardin. Lorsqu’il a sursauté en entendant le chien des voisins aboyer.
Jamais je n’aurais pu prévoir ça. Jamais vous ne pourrez prévoir ça. On vous dit que si vous choisissez un chiot chaleureux, qui vous fait la fête dès votre première rencontre et ne semble pas dominant, alors vous aurez choisi le bon. C’est faux. Eleven était un chiot adorable, qui essayait de monter sur les genoux. Mais c’était Dr Jekill et Mr Hyde. Il suffit de l’emmener en pleine cambrousse et de le regarder courir partout, faire la fête aux vaches et se rouler dans la boue (et se faire la malle) pour s’en convaincre.
Point numéro 2 : votre chien passera après votre gamin. Je ne sais pas si c’est une chose évidente, ni même si c’est une bonne ou une mauvaise chose, mais c’est ainsi: une fois que les enfants arrivent, le chien est relégué à une place moins enviable. Moins de caresses, plus de « pousse-toi de mes jambes ». Vous n’imaginez pas tous les croche-pieds qu’un chien est susceptible de vous faire quand vous portez un nourrisson de trois semaines. Hier, vous l’évitiez simplement, mais soudain il vous paraît dangereux, et vous l’éloignez sans cesse, lui criez de reculer, arrête de sauter tu vas lui faire mal, ne bouge plus tu mets des poils…
Les poils, parlons-en : nous passons notre vie armés d’un rouleau collant. Sur les vêtements, sur les jouets, sur les draps bien qu’il ne s’en approche pas. Même notre fille de deux ans sait s’en servir. Le pire moment a été la longue période où notre bebe joufflu galopait à 4 pattes ou rampait, mâchonnant allègrement les paquets de poils. Je rêve d’un tapis que je n’aurais jamais, parce qu’il serait immédiatement recouvert de longs poils blancs impossibles à décoller.
Je donne sûrement l’impression que je déteste mon chien. Ce n’est pas le cas. Il me rend juste chèvre :). Je donnerais n’importe quoi pour lui, pour qu’il soit bien. J’ai appelé des dizaines de garderie avant de trouver la bonne parce que je savais précisément dans quelles circonstances il serait vraiment bien. J’ai essayé plein de techniques différentes pour le rendre moins peureux, consultant nuit après nuit des tas de sites canins qui ne reflétaient jamais tout à fait notre réalité. Mais je refuse de me voiler la face et de couvrir également la vôtre en vous donnant l’image d’un prétendu chien idéal. Ce n’est pas juste le bonheur un chien. Mais ça en mérite par contre. Et se rendre compte à temps que l’on ne va pas pouvoir lui en donner, ça permet d’éviter une nouvelle séparation six mois plus tard.
Je n’ai jamais voulu me séparer de lui. J’y aurais sûrement songé s’il était devenu dangereux pour nos enfants. Mais nous avons supporté bon gré mal gré les insupportables sorties en ville, et son corps trop gros dans notre salon trop petit. Parce que nous savions que nous changerions un jour pour lui permettre de s’épanouir. Depuis que nous l’avons, nous avons toujours pensé à lui comme un membre à part entière de la famille, dont le vote, certes muet, valait autant que celui des autres. Lorsque nous sommes partis au Canada, il n’a jamais été question de le laisser en arrière. Je me souviens que des gens nous posaient la question, surpris parce qu’on l’emmenait. Moi j’ai toujours été surprise qu’on me pose la question. À la fin je répondais « oui et j’emmène ma fille aussi ». Je voulais montrer la bêtise que m’inspirait cette question.
Lorsque nous avons voulu acheter, nous avons vite renoncé aux appartements sans ascenseur. Car qui dit gros chien dit problème de hanches potentiel, et je n’avais aucune envie de devoir un jour le porter sur trois étages. Lorsque nous avons acheté la voiture, le constat a été le même : il nous fallait un véhicule dans lequel il puisse voyager en ayant un minimum de place. Pas question de l’obliger à rester assis aux pieds des heures durant parce que nous rêvions d’un coupé sport plutôt que d’un SUV. Je n’aurais jamais hypothéqué le bien-être mon chien pour pouvoir jouir d’un faste qui ne pouvait l’inclure.
Je ne suis pourtant pas mieux que les autres. Je me suis parfois demandée s’il ne serait pas mieux, ailleurs, adopté par quelqu’un d’autre, chez un couple de retraités qui vivraient dans la campagne profonde avec trois vaches et une poule. Et quelque part, en toute honnêteté, ce serait probablement le cas. Mais je ne supporte pas l’idée qu’il puisse être malheureux chez quelqu’un d’autre et de ne rien y pouvoir. Et si la personne, excédée comme moi-même je peux l’être quand il me renverse pour se cacher dans une chambre parce que le facteur a osé frapper à la porte, en venait à le taper ? Et s’il passait l’hiver dehors ? Et s’il était mal nourri ? Et s’il était abandonné à nouveau et que je perdais sa trace ? Égoïstement je préfère le savoir moyennement bien avec nous dans une maison que – je sais – il juge trop bruyante, plutôt que potentiellement malheureux chez quelqu’un d’autre. Et puis il y a autre chose : il a apporté beaucoup à ma fille. Chaque fois que je la vois poser sa petite menotte douce sur sa tête, chaque fois qu’elle le prend dans ses bras, aussi largement que ceux-ci le lui permettent, chaque fois qu’elle tombe en pâmoison devant un animal, je mesure ce qu’il lui a apporté. Elle est arrivée dans notre famille alors qu’Eleven était déjà là, et ça l’a, quelque part, rendue meilleure. J’en suis persuadée.
Adopter un chien de façon réfléchie, ce n’est pas se dire qu’on sera capable de tous les jours le sortir, ou penser que oui, c’est bon, il y aura toujours des amis pour le garder au moment des congés. C’est plutôt se demander ce qu’on est capable de lui apporter nous, quels sacrifices on est prêt à faire, quelle place on accepte qu’il prenne dans votre vie. En d’autres termes, ne vous demandez pas ce qu’avoir un chien va changer pour vous, demandez-vous ce que vous, vous allez changer pour lui. Alors vous aurez commencé, déjà, à le voir avec le respect qu’il mérite.
-Lexie Swing-
C’est beauuuuuuu !
J’avais un chien, poilu, il me manque encore aujourd’hui. J’ai fais le choix de ne pas me battre pour le garder quand ma 1ère histoire d’amour s’est terminé. Impossible de le laisser enfermé en appart chez mes parents (dans un premier temps) alors qu’il arpentait le jardin et les champs qui nous entouraient quotidiennement !
Mon nounours de 60 kg a jamais dans mon cœur. Et on m’a informé il y a peu qu’il avait rejoint le paradis des chiens sans douleurs.
C’est ton ex qui l’a gardé ? Moi je me suis tjs dit que si je devais m’en séparer, je trouverai une personne que je puisse visiter, en qui j’ai confiance, etc. C’était quoi comme chien ? J’adore les gros même si c’est pas pratique :)
Dingue! Ton chien c’est ma chienne, il faut qu’on les présente!!! Elle a peur du vent, à une époque elle sautait sur nos genoux dès que quelqu’un sonnait/frappait (30kg la bête, hein), quand on se promène si on s’arrête trop longtemps elle se met à couiner de peur qu’on l’oublie (ce n’est pourtant jamais arrivé…), elle vérifie sans cesse ou vont les gens, ce qu’ils font, elle nous bouscule…
Et elle adore la campagne aussi… Mais on vit en appartement! Mais comme tu le dis si bien, je préfère qu’elle soit moyennement bien avec nous que potentiellement malheureuse ailleurs parce que malgré ses côtés « encombrante », on va dire, on l’aime tous d’amour fou :)
Ca fait du bien de savoir qu’il existe pareil ailleurs :) est ce que tu arrives à la promener sans problème en ville? Nous il se retourne tout le temps comme s’il était suivi!
Lol « cas social » m’a fait rire. Ton chien, je le trouve super attachant justement du fait de son côté un peu peureux et son regard à la fois plein de malice et de crainte. Aucun toutou n’est parfait, et avoir un chien, c’est une sacrée contrainte qu’il faut assumer. Mais toi comme moi (et heureusement, bien d’autres!) savions cela avant de choisir d’adopter.
J’ai la chance d’être tombée sur une chienne adorable, qui ne fait jamais aucune bêtise (vraiment) et dont la seule crainte semble être celle qu’on l’abandonne comme ses anciens maîtres ont pu le faire. Gagner sa confiance n’a pas été simple, mais à force de persévérance et d’exercices variés, on a réussi.
En ce moment, on commence les démarches pour qu’elle puisse nous suivre en Australie. Il nous faut demander le permis d’importation. J’angoisse de me dire qu’elle pourrait être refusée là-bas. Que ferions-nous ? Vivre ne serait-ce que quelques jours séparée d’elle me rend malade, alors je conçois difficilement de la confier sur du long terme à quelqu’un d’autre. Et en même temps, suis-je prête à sacrifier mon projet australien ? Je ne pense pas…
Alors je croise les doigts pour que les (excessivement coûteuses) démarches se déroulent au mieux et qu’elle puisse nous suivre comme ça a été le cas pour ici. Si effectivement j’ai une bonne étoile, je la supplie de faire le nécessaire pour que je n’aie pas à prendre la décision que je serais bien incapable de prendre… !
Je savais qu’il y avait une quarantaine mais je ne pensais pas qu’elle pouvait être refusée?
Si le permis d’import n’est pas accepté, je n’ai aucun recours, sauf s’il est refusé pour document manquant ou info manquante etc. Une fois le permis accepté, il n’y a plus de problème, il n’y a plus qu’à passer qq fois chez le veto et prendre l’avion, et il y a ensuite une quarantaine de 10 jours sur place. Pour l’instant, je n’ai même pas encore rassemblé tous les documents pour la demande de permis…
ok
Trop drôle ton chien ! J’aime toujours le voir sur instagram, c’est un vrai membre de la famille ! avec son caractère, ses besoins, ses émotions… ça me paraît évident aussi qu’il est à considérer ainsi, mais apparemment ce n’est pas le cas de tout le monde…
Tu soulèves la question des enfants, j’ai eu plusieurs cas autour de moi de gens qui ont dû se séparer de leur chien car il a représenté un danger pour leur enfant (morsure), et quel déchirement… pour eux, pour les enfants, pour le chien. C’est ces moments où tu aurais envie de rembobiner la cassette et éviter cet instant qui a conduit à la séparation :-(
Oui malheureusement dans un cas comme ça, tu ne peux pas forcer la cohabitation. Et la séparation est déchirante!
Oui, et il ne faut pas oublier qu’un chien ça peut vivre longtemps! Quetsch a 15 ans 1/2 maintenant et un vieux chien c’est encore plus de contraintes. On l’assume jusqu’au bout mais c’est clair qu’on n’aura pas d’autre animal ensuite…
Oh oui c’est vraiment la contrainte quand l’âge fait qu’ils deviennent incontinents, sourds et perclus de rhumatismes… Mes parents avaient une chienne qui a eu des problèmes de santé toute sa vie, avec l’investissement que ça comporte : elle a vécu jusqu’à 18 ans! lol!
Merci de me remonter le moral! Encore 2 ans 1/2…. comment dire… À la fois il n’a jamais été malade de sa vie… Maintenant il est quasiment aveugle, commence à avoir des fuites mais il semble encore vouloir vivre. C’est comme pour nous, c’est pas beau de vieillir!
On a donné notre chienne parce qu’elle était agressive et qu’autant quand on était que nous, on savait se tenir loin d’elle quand elle montrait les dents mais une fois notre première arrivée, ça a été source de beaucoup de tensions/engueulades. On a fini par lui chercher une famille mais encore aujourd’hui je me demande s’ils l’ont vraiment gardée, s’ils en ont bien pris soin, etc. On avait appelé au début mais avec le temps, tu veux aussi tourner la page et ce n’est pas simple.
En tout cas, ce chien m’a vacciné à vie je pense alors que j’adorais ça avant!
Je me suis reconnue dans les histoires d’animaux dans les pattes et de poils partout, ce qui est particulièrement horripilant avec un bébé. Sauf que chez nous c’est un chat. Mais bon, l’histoire est la même (bien qu’un chat soit objectivement moins encombrant qu’un chien). Chez nous le lapin a été relégué au second plan avec l’arrivée du chat. Puis le chat a été délaissé au profit du bébé. Je me demande ce qu’il arrivera si on a un autre enfant….
Cela dit on a décidé d’avoir un animal et on l’assume. Même si c’est pas toujours facile. Le coeur est extensible -on peut aimer tout le monde- mais par contre le temps et le nombre de bras ne le sont pas ….
On a tendance à reléguer… puis à culpabiliser c’est sûr. On leur accorde beaucoup de place quand ils sont seuls et ensuite, ça devient moins évident.